RÉSUMÉ DE LA DEMANDE
Le demandeur est le père de deux enfants âgés de 12 et 11 ans. Il questionne la commission quant au respect du code de déontologie par un psychologue qui a rédigé deux « attestations » manuscrites, une pour chacun des enfants, dans le cadre de suivis psychologiques de durées différentes et à présent achevés. Le demandeur précise que ces suivis ont été engagés à l’initiative de son ex-femme, sans qu’il en ait été informé. S’appuyant sur « divers avis », le demandeur avance que ces écrits « sortiraient du secret professionnel ». Il émet un doute sur « l’impartialité » du psychologue.
Documents joints :
Année de la demande : 2021 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : - Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels) |
La Commission se propose de traiter du point suivant :
Les écrits du psychologue dans le cadre d'une procédure judiciaire entre parents d’enfants mineurs. Dans le cadre de son exercice, le psychologue est appelé à respecter un certain nombre de règles précisées par le code de déontologie, ainsi que le mentionne le Préambule : Préambule : Le présent Code de déontologie est destiné à servir de règle aux personnes titulaires du titre de psychologue, quels que soient leur mode et leur cadre d’exercice, y compris leurs activités d'enseignement et de recherche. […] Le respect de ces règles protège le public des mésusages de la psychologie et l'utilisation de méthodes et techniques se réclamant abusivement de la psychologie.
Le Code encadre la pratique du psychologue. Il est régi par des principes et recommandations qui s’appliquent à faire reconnaître la personne humaine ainsi que ses droits fondamentaux, notamment sa dignité comme le précise le Principe 1 : Principe 1 : Respect des droits de la personne « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s'attache à respecter l'autonomie d'autrui et en particulier ses possibilités d'information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l'accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l'intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n'est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Comme l’Article 13 le prévoit, l’écrit du psychologue peut faire suite à des situations qui lui sont rapportées : Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu'il a pu lui-même examiner ». C’est le cas du contenu des « attestations » produites par le demandeur qui rendent compte de scènes détaillées relatées par les enfants. En retour, le psychologue devait pouvoir garantir le respect du secret professionnel, au sens de l’article 7 : Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. » Cependant, les scènes décrites, susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique et physique des enfants, témoins des faits, auraient dû conduire le psychologue à questionner sa pratique à la lumière de l’article 19 : Article 19 : « Le psychologue ne peut se prévaloir de sa fonction pour cautionner un acte illégal et son titre ne le dispense pas des obligations de la loi commune. Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d’un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d’assistance à personne en péril. »
Si, au cours de ce suivi, l’intégrité de ces jeunes patients était potentiellement en jeu, le psychologue se trouvait alors dans la nécessité de transmettre ces informations qualifiées, en la matière, de préoccupantes, aux services compétents, pour qu’ainsi soient menées les investigations adéquates. Cependant le psychologue décrit une évolution positive dans les réactions de l’enfant le plus jeune, depuis que celui-ci n’est plus en contact avec son père. Cet élément pourrait alors expliquer que le psychologue n’ait pas procédé à la constitution/rédaction d’une information préoccupante, comme l’article 19 précédemment cité l’y invitait pourtant, ce qui répondrait par ailleurs à ce qu’édicte le Principe 3 : Principe 3 : Responsabilité et autonomie« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l’application des méthodes et techniques qu’il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »
Le psychologue a, ainsi, pris en compte le contexte dans lequel les enfants évoluent, et a tenu compte du caractère relatif de ses interprétations et avis, tel que cela est mentionné dans l’article 25 : Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »
Ici, la démarche retenue relève bien de prudence et mesure de la part de l’auteur des écrits, au sens du Principe 2 : Principe 2 : Compétence « […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. » La Commission souligne par ailleurs combien l’attitude du psychologue semble avoir voulu privilégier l’exercice de rigueur évoqué par le Principe 4 : Principe 4 : Rigueur « Les modes d'intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l'objet d'une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail. »
S’agissant d’une prise en charge d’enfants, qui s’engage à la demande d’un seul parent, le psychologue s’assure de respecter le consentement des détenteurs de l’autorité parentale comme rappelé par l’article 11 : Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l'autorité parentale ou des représentants légaux. » Certes, le psychologue aurait pu prendre contact avec le père, mais il peut avoir tenu compte du fait que le contexte familial, dans lequel ces enfants évoluaient, ne le permettait pas. Il oriente ses décisions selon l’article 2, en agissant dans l’intérêt de ses patients, selon les situations, notamment lorsque ceux-ci peuvent être l’enjeu de conflits parentaux : Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. » Enfin, l’article 20 donne des précisions quant au contenu et à la forme des écrits du psychologue. Article 20 : « Les documents émanant d'un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l'identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l'objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » La commission relève que si globalement les préconisations indiquées sont respectées, l’objet « attestation » va bien au-delà d’une simple attestation de suivi pour un des deux documents joints en mentionnant de manière détaillée des éléments d’observation et de propos rapportés par le plus jeune des enfants en lien avec le comportement de son père.
Pour la CNCDP La Présidente Michèle GUIDETTI La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité. |
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