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La requérante, psychologue, travaillait au sein d’une association pour « enfants problèmes-parents en difficulté  dans un centre d’accueil enfants parents ». Elle a été licenciée après avoir  signalé des problèmes de  maltraitance et abus sexuel qu’une adolescente, accueillie dans ce centre, aurait subis  dans sa famille d’accueil.
C’était son 5ième  signalement en 10 ans de travail dans le milieu de la maltraitance grave.  «  La raison du signalement n’est pas indiquée sur le motif du licenciement, mais d’autres raisons qu’[  elle] estime calomnieuses d’où [sa] contestation aux Prud’hommes ".
Elle signale également que « dans la rédaction de [sa] lettre de licenciement qui sera adressée au juge des Prud’hommes, est libellé en toutes lettres les noms des mères hébergées au centre et suivies par [elle] ce qui entraîne la suppression de l’anonymat ».
« [Elle doit se] rendre prochainement à [son] lieu de travail avec un huissier avec accord du juge car [elle craint] que [ses] notes confidentielles des entretiens avec les hébergées ne s’y trouvent plus ». Sur place, le constat est le suivant : « La clef de [son] bureau a été changé, toutes les notes confidentielles des séances et entretiens avec les enfants et adultes avaient disparues » « Ces notes appartiennent à l’association et ne sont en aucun cas à restituer à Mme.. (réponse de la directrice à l’huissier cf. son procès verbal). Pourtant « [la psychologue] a toujours fait la distinction entre [sa] rédaction du domaine psychologique lors de la remise du bilan psycho-éducatif de l’Equipe au juge pour enfants et inspecteur de l’aide sociale à l’enfance, référents de la famille concernée et [ses] notes de séance. Ceci en accord avec la personne suivie à laquelle  [elle] lisait cette partie [lui] incombant et avec son consentement. Ce bilan psycho-éducatif appartenant à l'institution est pour [elle] à différencier des notes personnelles des thérapies effectuées dans [son] bureau, liées au secret professionnel ».
« L’ Espace de rencontres qu’[elle a] créé à la demande du Conseil Général   dans le centre  d’accueil est un projet qui a été agréé, basé sur 2 postes de travail : un poste de psychologue, un poste d’éducatrice de jeunes enfants ». Selon les dires de la requérante,  « depuis [sa] mise à pied, c’est la directrice, qui était infirmière en pédopsychiatrie, qui a pris la place de psychologue. Les familles ne comprennent pas ce changement et [elle] conteste qu’une personne qui n’a pas le DESS de psychologue ait pris la place que requiert un tel espace de rencontres »
La requérante relève les articles du code de déontologie (articles 16 et 20)  qui lui paraissent  malmenés par ces pratiques.

Concernant « les notes confidentielles des séances entretiens avec les enfants et adultes », la requérante sollicite la CNCDP pour savoir si « cela  est contraire au Code de déontologie  que doit respecter [son] employeur, même si ces notes se trouvent sur un lieu privé appartenant à son association »?

La requérante joint à son courrier les documents suivants

  1. la lettre qu’elle a adressée à l’inspecteur de l’aide sociale à l’enfance
  2. sa requête  adressée au président de Tribunal de Grande Instance (TGI)
  3. l’ordonnance du TGI qui mandate un huissier pour pouvoir reprendre ses affaires personnelles
  4. le procès verbal dressé par l’huissiers mandaté par le GTI
  5. son curriculum vitae
  6. le témoignage de l’adolescente « maltraitée »
  7. le témoignage d’une sœur de l’adolescente « maltraitée »
  8. le témoignage d’une autre sœur de l’adolescente « maltraitée »
  9. une lettre de la mère des adolescentes qui déclare s’opposer au retour de sa fille dans le milieu « maltraitant »
  10. le témoignage de la mère des adolescentes
  11. la lettre du président de l’association  qui envisage le licenciement de la requérante
  12. un extrait du code de l’action sociale et des familles - section 6, article  L313-24
Posté le 30-11-2010 15:26:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2004

Demandeur :
Psychologue (Secteur Social)

Contexte :
Procédure judiciaire entre un psychologue et son employeur

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Signalement

Questions déontologiques associées :

- Signalement
- Responsabilité professionnelle
- Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
- Secret professionnel (Notes cliniques personnelles)
- Respect de la personne
- Continuité de l’action professionnelle /d’un traitement psychologique
- Titre de psychologue

Le dossier de la requérante comporte certains aspects relatifs au conflit  employeur/employé qui ne  sont pas du ressort de la CNCDP.
Dans sa réponse à la question de la requérante, la Commission  traitera les points suivants

  1. les notes  professionnelles de la psychologue
  2. le respect des droits fondamentaux des personnes, le respect du secret professionnel
  3. l’impossibilité de la continuité de son action professionnelle

1- Les notes professionnelles à caractère confidentiel de la psychologue sont des documents personnels Ces  notes  ne sont ni exigibles  par des tiers, ni transmissibles, elles sont prises en vue d’étayer son examen critique, son élaboration et ses conclusions. Ces notes donnent lieu à la rédaction de comptes rendus communicables.  L’article 17  précise cette approche d’appréciation personnelle: <<La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques qu’il met en œuvre. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques>>.
La psychologue assume sa responsabilité professionnelle  quand elle fournit à l’institution des rapports sur chacune des personnes accueillies dans le centre. En transmettant ses conclusions, la psychologue respecte strictement l’article 12 du code de déontologie des psychologues << le psychologue est seul responsable de ses conclusions….. Il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel. Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu’à la question posée et ne comportent des éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire>>.

2- Le souhait de la psychologue  de vouloir reprendre ses notes confidentielles est tout à fait conforme aux exigences du code de déontologie des psychologues. << Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection>>  titre I-1 . Le fait que l’institution détienne les notes professionnelles de la psychologue va à l’encontre de son  obligation de préserver la vie privée des personnes <<Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même>>  .  Titre I-1.
Donner dans la lettre de licenciement  au juge des Prud’hommes les noms en toutes lettres des mères hébergées au centre bafoue le  respect du secret professionnel, l ‘anonymat n’est plus préservé <<Le psychologue connaît les dispositions légales et réglementaires issues de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. En conséquence, il recueille, traite classe, archive et conserve les informations  et données afférentes à son activité selon les dispositions en vigueur. Lorsque ces données sont utilisées   à des fins d’enseignement, de recherche, de publication ou de communication, elles sont impérativement traitées dans le respect absolu de l’anonymat, par la suppression de tout élément permettant l’identification directe ou indirecte des personnes concernées…..>>.  Article 20.

3- Le licenciement mis en  œuvre pendant son absence place la psychologue dans une position difficile vis à vis des personnes qu’elle a accueillies. Elle n’a  pas pu satisfaire aux obligations que lui fait le Code dans son article 16 << Dans la cas où le psychologue est empêché de poursuivre son intervention, il prend des mesures appropriées pour que la continuité de son action professionnelle soit assurée par un collègue avec l’accord des personnes concernées…. >>. Dans le cas où, l’institution, ferait fonctionner « l’espace rencontres », initialement agréé avec un poste de psychologue, en remplaçant celui-ci dans ses fonctions et responsabilités professionnelles par  une personne qui ne peut se prévaloir du titre professionnel correspondant,   elle mettrait  cette personne en position d’usurpation du titre  de psychologue <<L’usage du titre de psychologue est défini par la loi n° 85-772 du 25 juillet publiée au JO du 26 juillet. Sont psychologues les personnes qui remplissent les conditions du qualification requises dans cette loi. Toute  forme d’usurpation du titre est passible de poursuites >>.  Article  1.

 

PARIS, le 12 mars 2005
pour la CNCDP
Jean CAMUS
Président

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Avis 04-26.doc

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