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La requérante, psychologue détachée de l’Education Nationale, en attente de titularisation dans la Fonction Publique Hospitalière, exerce dans un Institut de Rééducation depuis 18 mois.

Dans les trois courriers qu’elle adresse à la Commission, la requérante se plaint des pressions qu’exerce sur elle l’un des deux psychiatres vacataires dans l’institution où elle travaille, ce qui nuit à son travail au sein de l’équipe et porte atteinte à sa santé.

Elle refuse de fournir à ce psychiatre, comme il l’exige, les résultats chiffrés et détaillés du WISC III car elle craint qu’il utilise d’une façon qu’elle n’approuverait pas les notes à certains subtests qui concernent les possibilités d’attention des enfants. Elle ne fournit donc que les différents QI (Quotient Intellectuel).

Par ailleurs, le psychiatre aurait proféré à son encontre des propos insultants et aurait remis en cause ses compétences professionnelles et son fonctionnement psychologique. Dans un courrier adressé au directeur, elle évoque le fait que : « La communication actuelle avec le docteur ne permet, en effet (….) qu’une relation exclusive entre psychiatre et psychologue, et l’instrumentalisation du rôle de ce dernier, au détriment de l’intérêt de l’enfant ».

A de nombreuses reprises, la requérante a demandé, par écrit, lors de réunions institutionnelles et lors d’un entretien avec le directeur, que ses fonctions dans l’établissement soient éclaircies en raison, en particulier, des divergences qui semblent exister entre la manière dont la direction de l’établissement et le psychiatre en cause envisagent le profil du poste de psychologue de l’établissement.

Dans un courrier adressé au directeur, le psychiatre en cause, écrit « elle (la requérante) pense avoir été embauchée plutôt comme psychothérapeute d’inspiration analytique, que pour le profil du poste que vous avez déposé à la DDASS et qui correspond à un psychologue polyvalent (…). C’est pourquoi, Monsieur le Directeur, je vous demande de lui permettre ( à la requérante) de clarifier rapidement sa position vis-à-vis du profil du poste que vous avez déposé à la DDASS ». De son côté, dans un courrier adressé à la requérante, le directeur l’a assuré du respect de son autonomie technique, tout en soulignant la nécessité de travailler avec l’ensemble de l’équipe : « c’est à vous d’évaluer votre action selon les demandes et réponses bilatérales dans la problématique des prises en charge psychologiques au sein du contexte institutionnel ».

La requérante, ne se sentant pas protégée par le directeur et insatisfaite des réponses qu’il lui a apportées, a sollicité un rendez-vous avec la DDASS. Dans la troisième lettre, elle donne un compte-rendu détaillé d’une rencontre avec deux inspectrices de la DDASS. Elle leur a demandé à ce que lui soit notifié, par écrit, l’obligation de donner des résultats détaillés des examens psychologiques au psychiatre. Elle s’est senti déstabilisée lorsqu’il lui a été rappelé que l’arrêté de titularisation n’avait pas encore été signé.

La requérante joint de nombreuses pièces à ses trois lettres de requête :

  • Copie des bordereaux de recommandés au directeur de l’institution de soin et à celui de la DDASS, pour solliciter un rendez-vous
  • Lettre du psychiatre au directeur évoquant ses conflits avec la requérante avec copie à la requérante, au délégué syndical, au collègue psychiatre qui travaille également dans l’établissement
  • Copie de la lettre de la requérante sollicitant un rendez-vous au directeur de l’établissement
  • Lettre du directeur rappelant le fonctionnement de l’institution et les fonctions du psychologue.
  • 2 fiches de notation de la requérante par le directeur de l’institution

Des documents cliniques :

  • 21 fiches individuelles nominatives appelées « Comptes rendus d’examens psychologiques » signées par la requérante.
  • 5 notes personnelles manuscrites rendant compte de la manière dont, lors de réunions institutionnelles, la requérante a sollicité le directeur concernant son travail avec les équipes
  • 8 notes nominatives, dont on ne connaît pas les auteurs, concernent les diagnostics et indications de soins ou de bilans pour des enfants. Ces notes sont probablement extraites des dossiers médicaux
Posté le 07-01-2011 17:03:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2002

Demandeur :
Psychologue (Secteur Santé)

Contexte :
Relations/conflit avec les médecins

Objet de la demande :
Organisation de l’exercice professionnel
Précisions :
Fonctions du psychologue/ Fiche de poste

Questions déontologiques associées :

- Transmission de données psychologiques (Compte rendu à des partenaires professionnels)
- Responsabilité professionnelle
- Compétence professionnelle (Elaboration des données , mise en perspective théorique)
- Respect du but assigné
- Mission (Compatibilité des missions avec la fonction, la compétence, le Code de déontologie, dans un contexte professionnel donné)
- Confraternité entre psychologues

Cette situation difficile met en jeu à la fois un conflit institutionnel et surtout un conflit de personne, or, comme le rappelle le préambule ci-dessus, la Commission Nationale de Déontologie des Psychologues a pour unique mission de se prononcer sur les aspects déontologiques des dossiers qui lui sont adressés. Elle ne traitera donc pas de l’attitude du psychiatre et ne discutera que des incidences de ce conflit, sur le plan de la déontologie, en ce qui concerne :

  • 1- La présentation à des tiers des résultats des comptes rendus d’examens
  • 2- La définition du profil du poste de psychologue
  • 3- Les recours possibles du psychologue dans cette situation

Par ailleurs, en s’appuyant sur les exigences du secret professionnel, même entre collègues, définies par le Titre 1-1 du Code de Déontologie des psychologues - « Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même » -, la Commission ne peut que déplorer que la requérante ait omis de rendre anonymes les documents cliniques joints à sa requête. Elle aurait dû effacer les noms et dates de naissance des enfants.

1 La présentation à des tiers des résultats des comptes rendus d’examens

L’Article 12 du Code affirme : « Le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et des outils sur lesquels il les fonde et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs ». Dans ce cas, la psychologue aurait pu faire état des résultats à chacun des subtests en développant l’interprétation qu’elle en faisait. Par ailleurs, l’Article 17 précise que « La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques qu’il met en œuvre. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques ». Ainsi, transmettre les résultats chiffrés du WISC III ne porte pas atteinte à l’autonomie technique de la psychologue, à condition que ces résultats soient analysés et articulés entre eux, dans un compte rendu élaboré par le psychologue. Ceci s’impose d’autant plus que les documents joints par la requérante montrent à quel point les examens psychologiques ont une importance centrale dans les décisions concernant l’orientation des enfants et les choix en matière de prescriptions médicales dans cet établissement. L’utilisation par le psychiatre des résultats à l’un des subtest du WISC, peut, sans déroger aux règles de déontologie, faire l’objet d’une collaboration entre psychologue et psychiatre, pour peu que le premier puisse rester responsable des conclusions interprétatives qu’il en fait.

Enfin, l’Article 12 précise : Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu’à la question posée et ne comportent des éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. Dans ce cas, peut-être y-a-t-il eu un manque de communication entre le psychiatre et la requérante, sur l’utilisation des résultats des bilans.

2 - La définition du profil du poste de psychologue

La personne qui a pour attribution de définir les fonctions du psychologue de l’institution ne semble pas clairement déterminée : DDASS ? Directeur de l’institution ? L’un ou les deux psychiatres de l’institution ? La lettre du psychiatre et les réponses du directeur, laissent à penser qu’il y aurait entre eux une divergence de point de vue sur les fonctions du psychologue. Ce manque de clarté a probablement contribué à ce que la requérante ne sache plus, avec certitude, quel était le profil de son poste. De ce fait, elle s’est trouvée dans une situation difficile car, dans le cas où les buts assignés sont mal explicités, il est difficile de respecter le Titre I-6 qui stipule : « Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement » et d’être en conformité avec l’Article 7 qui ajoute : « Le psychologue accepte les missions qu’il estime compatibles avec ses compétences, sa technique, ses fonctions, et qui ne contreviennent ni aux dispositions du présent code, ni aux dispositions légales en vigueur. ». En effet, se conformer à ces deux articles suppose que le psychologue en poste sache exactement quelles seront ses fonctions dans l’institution, ce qui ne semble, aux dires de la requérante et à la lecture des différents courriers, ne pas être le cas.

3 - Les recours possibles du psychologue dans cette situation`

Dans cette situation, le conseil de collègues plus expérimentés pourrait être, pour cette psychologue, en attente de titularisation, un recours pertinent. L’Article 21 précise, en effet, que ceux-ci doivent répondre « favorablement à « sa » demande de conseil et « l’ » aide « r » dans les situations difficiles, notamment en contribuant à la résolution des problèmes déontologiques ».

 

Conclusion

Au vu des documents produits par la requérante, la Commission constate que le manque de clarté dans les attributions des fonctions du psychologue dans cette institution a pu rendre difficile la possibilité d’exercer cette profession dans le respect de la déontologie, en particulier, pour ce qui concerne la nécessaire collaboration entre psychiatre et psychologue, dans ce type d’établissement.

Pour la CNCDP
Le Président
Vincent ROGARD
Fait à Paris le 8 mars 2003

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Avis 02-32.doc

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