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RÉSUMÉ DE LA DEMANDE

Le demandeur est le père de deux enfants de 7 et 5 ans. Cans le contexte d'une procédyre engagée auprès du Juge aux Affaires Familiales (JAF), le demandeur interroge la Commission pour qu'elle émette un avis "éclairé et d'expert sur la validité aussi bien sur le fond que sur la forme d'un document émanant d'une psychologue diligentée par (son) ex-compagne". Le psychologue a rédigé un document relatant une séance avec l'aîné des enfants. Le demandeur estime que le document présente un "manque de précisions et d'objectivité et ne fait qu'avancer des idées et tirer des conclusions hâtives et ambigües".

Document joint :

  • Copie d’un document manuscrit d’une psychologue.
Posté le 22-01-2023 15:00:43

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2021

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Compte rendu

Questions déontologiques associées :

- Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
- Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Les écrits du psychologue dans le cadre d'une procédure judiciaire entre parents d’un enfant mineur.

 

Les écrits du psychologue dans le cadre d'une procédure judiciaire entre parents d’un enfant mineur.

Le document non nommé et sans indication de destinataire relate que la psychologue a reçu « en séance », dans le cadre d’un « suivi thérapeutique » un garçon dont le nom et le prénom sont indiqués sans que son âge, en revanche, ne soit précisé, bien qu’il soit mineur.

Concernant la pratique auprès d’un mineur, quand le psychologue intervient à la demande d’un seul parent, l’autre parent est réputé informé et avoir consenti en tant que « tiers de bonne foi » à la démarche de consultation. Cependant, le psychologue ne peut méconnaître l’article 11 :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l'autorité parentale ou des représentants légaux. »

Dans l’intérêt des mineurs, la Commission préconise de pouvoir entendre l’autre parent, en particulier dans le contexte d’un divorce conflictuel. Les restrictions qui peuvent faire obstacle à rechercher l’avis ou le consentement du parent absent, voire motiver un refus de toute communication avec lui, résultent de la prise en compte d’un danger potentiel pour le mineur ou du refus de ce dernier à ce que son parent intervienne dans sa démarche thérapeutique. Ces occurrences sont évoquées dans les articles 10 et 19 :

Article 10 : « Le psychologue peut recevoir à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi en tenant compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales et réglementaires en vigueur. »

Article 19 : « (...) Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l'intégrité psychique ou physique de la personne qui le consulte ou à celle d'un tiers, le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir en tenant compte des dispositions légales en matière de secret professionnel et d'assistance à personne en péril. Le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil auprès de collègues expérimentés. »

Les éléments retranscrits de cette rencontre sont centrés sur les difficultés de l’enfant : diminution des résultats scolaires, augmentation des troubles du sommeil. La psychologue fait le lien entre la « ré-émergence de ses angoisses et les rencontres avec son père » et termine en indiquant qu’elle « reste à votre disposition pour toute information complémentaire ».

Le psychologue qui choisit de fournir un écrit aux personnes qui lui demandent le fait au regard du Principe 3.

Principe 3 : Responsabilité

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l'application des méthodes et techniques qu'il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer »

 

Dans le cas relaté, la mission de la psychologue est précisée dans l’écrit, par l’emploi du mot « séance » et l’indication d’un « suivi thérapeutique » de l’enfant. Dans le contexte d’une telle mission, la restitution des propos et comportements de l’enfant pose la question du respect du but assigné tel que l’énonce le Principe 6.

Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

 

Dans la situation présente, il n’est pas précisé si l’enfant a donné son consentement pour que ses propos soient retranscrits dans le document remis à sa mère et s’il a bien été informé de l’utilisation que celle-ci pouvait en faire, comme le préconisent le Principe 1 et l’article 7.

Principe 1 : Respect des droits de la personne 

«  Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s'attache à respecter l'autonomie d'autrui et en particulier ses possibilités d'information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l'accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l'intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n'est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même.

Article 7 : « Les obligations concernant le respect du secret professionnel s’imposent quel que soit le cadre d’exercice. »

Par ailleurs, même si figure le numéro ADELI dans le tampon apposé sur la signature de la psychologue, et que le document comporte bien ses coordonnées professionnelles, sa signature et la date, comme y invite l'article 20, cet écrit ne fait pas référence à un accord explicite pour sa transmission, pas plus qu'il ne comporte d’objet ni de destinataire :

 

Article 20 : « Les documents émanant d'un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l'identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l'objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. Il refuse que ses comptes rendus soient transmis sans son accord explicite et fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. »

 

Quand un document est remis à un demandeur, sans comporter de destinataire, il est d'usage d’indiquer « remis en main propre à XXX pour valoir ce que de droit ». Cette mention vaut pour accord du psychologue pour la transmission à des tiers.

L’absence de cette mention ne signifie pas pour autant que la psychologue ignorait que ce document serait utilisé par la mère pour être produit en justice. A cet égard, la Commission s’interroge sur la personne invitée à se mettre en relation avec la psychologue « pour toute information complémentaire ».

Pour finir, plus globalement, dans des circonstances d’une séparation conflictuelle des parents, contexte qui peut mettre les enfants en souffrance, leur prise en charge thérapeutique requiert tact et prudence. La psychologue aurait eu intérêt à s’appuyer sur le Principe 6 pré-cité et l’Article 25.

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

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Avis-21-07-V.F.pdf

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