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RÉSUMÉ DE LA DEMANDE

Le demandeur s’adresse à la Commission pour « signaler » un psychologue « spécialisé dans le sevrage tabagique » qui exerce dans « l’unité psychosomatique » d’un hôpital privé. Ce dernier aurait reçu l’épouse du demandeur, à quatre reprises, à l’issue desquelles il a produit un « compte rendu de suivi de trois pages », non joint à la demande, qui a été remis à l’avocat de celle-ci. Ce document a été versé au dossier de la procédure de divorce entamée par le couple.

Bien que récusé par l’avocat du demandeur et retiré du débat contradictoire par le Juge aux Affaires Familiales (JAF), le demandeur considère que cet écrit, « à charge » contre lui, suscite plusieurs questions déontologiques qu’il souhaite voir commentées par la Commission. 

Dans le récit joint, le demandeur indique avoir « croisé » cet homme dans le cadre de leur « paroisse » et également rencontré dans un contexte personnel, au domicile du psychologue.

Le demandeur interroge le rapport du psychologue à « la vérité », son absence de neutralité, ses « méthodes plus que contestables » et son respect du secret professionnel.

Document joint :

Copie d’une « lettre ouverte » adressée par le demandeur au psychologue et transmise en copie au Directeur de l’hôpital privé ou il exerce ainsi qu’à la Fédération Française des Psychologues et de Psychologie (FFPP).

Posté le 12-10-2021 21:40:28

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Tiers)

Contexte :
Procédure judiciaire entre époux

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Compte rendu

Questions déontologiques associées :

- Autonomie professionnelle
- Évaluation (Relativité des évaluations)
- Respect du but assigné

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Modalités d’intervention du psychologue dans le contexte d’un conflit conjugal.

Modalités d’intervention du psychologue dans le contexte d’un conflit conjugal.

 

Le demandeur n’ayant pas joint la copie du « compte rendu de suivi de trois pages » cité dans son courrier, la Commission n’a pu se prononcer sur l’aspect formel dudit écrit. Elle rappelle que le psychologue est responsable, en toute autonomie, des modalités de son intervention, en vertu du Principe 3 du Code et qu’elle n’est ni habilitée à juger du caractère légal de ce même écrit, ni à se prononcer sur le contexte disciplinaire lié au lieu d’exercice du professionnel « signalé » :

            Principe 3 : Responsabilité et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l'application des méthodes et techniques qu'il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité de les distinguer et de les faire distinguer. »

Dès lors, peu d’éléments d’informations sont accessibles, en dehors des déclarations du demandeur, pour accréditer du qualificatif de « contestables » des méthodes qui ont été employées pour entendre l’épouse du demandeur et accepter de lui délivrer un document écrit.

Le psychologue construit son intervention en respectant les droits de la personne et en prenant soin de délimiter avec elle l’objectif du travail engagé comme les Principes 1 et 6 le stipulent :

            Principe 1 : Respect des droits de la personne

« Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il s'attache à respecter l'autonomie d'autrui et en particulier ses possibilités d'information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l'accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées. Il préserve la vie privée et l'intimité des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. Il respecte le principe fondamental que nul n'est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. »

            Principe 6 : Respect du but assigné

« Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. »

Dans la situation présente, le demandeur cite un bref extrait du compte rendu dans lequel le psychologue aurait invité sa patiente à ne pas « contredire frontalement » son mari dans le but de ne pas « provoquer une exacerbation des symptômes, voire une décompensation ».

Ces propos, vécus comme accusatoires par le demandeur, constituent une appréciation de son état psychique qui s’appuie probablement sur les dires de son épouse et, peut-être aussi sur ce que le psychologue avait pu antérieurement percevoir du demandeur. Ils ne constituent pas pour autant une évaluation de sa personnalité, qui n’aurait été recevable qu’après l’avoir entendu en personne. Si le psychologue a pris soin de « retranscrire » la parole de sa patiente pour étayer son avis sur sa relation conjugale, il est resté en accord avec l’article 13 :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu'il a pu lui-même examiner. »

Consigner les propos de l’épouse, avec son accord, ne constitue pas non plus une atteinte flagrante au secret professionnel, au sens du Principe 1 déjà cité, même si ce choix peut être questionné, eu égard à la manière dont ils ont été exploités dans la procédure.

Par ailleurs le fait d’avoir déjà rencontré le couple antérieurement, ou l’avoir « croisé » dans un lieu de culte, n’oblige pas, pour autant, le psychologue à se récuser, car il ne s’agit pas là d’une relation suivie à titre personnel au sens de l’article 18 :

Article 18 : « Le psychologue n’engage pas d’intervention ou de traitement impliquant des personnes auxquelles il est personnellement lié. Dans une situation de conflits d’intérêts, le psychologue a l'obligation de se récuser ».

Enfin, l’utilisation ultérieure d’un compte rendu de consultation dans une procédure de divorce reste de la seule responsabilité d’une plaignante et de son avocat. Il ne peut que rester circonstancié et daté car le psychologue est conscient du caractère relatif de ses appréciations comme le rappelle l’article 25 :

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. »

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

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