Année de la demande : 2006
Demandeur : Psychologue (Secteur Social)
Contexte : Relations/conflit avec la hiérarchie, l’employeur, les responsables administratifs
Objet de la demande : Écrit d’un psychologue Précisions : Dossier institutionnel
Questions déontologiques associées :
- Confidentialité (Confidentialité des locaux)
- Consentement éclairé
- Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
- Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
- Secret professionnel (Notes cliniques personnelles)
- Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
- Écrits psychologiques (Statut des écrits professionnels (différences entre attestation privée et professionnelle, compte rendu, expertise, etc.))
- Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels (identification du psychologue, du destinataire))
- Écrits psychologiques (Archivage (conservation des documents psychologiques au sein des institutions : dossiers, notes personnelles, etc.))
- Écrits psychologiques (Protection des écrits psychologiques (pas de modification ou de transmission sans accord du psychologue))
- Compétence professionnelle (Elaboration des données , mise en perspective théorique)
- Évaluation (Relativité des évaluations)
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La Commission reprendra les questions posées par la demandeuse, en regroupant les deux dernières
1- Un psychologue peut-il conserver des comptes rendus de bilan détaillés et des protocoles de tests, sans les joindre au dossier de l’enfant ?
Un bilan psychologique requiert différents types d’écrits professionnels de la part d’un psychologue : les notes personnelles issues de ses observations ou de l’entretien avec l’enfant, les données brutes de l’examen psychologique (protocoles des différents tests utilisés), le compte-rendu de synthèse élaboré à partir de ces différentes données. La commission s’est déjà prononcée à plusieurs reprises sur la distinction qu’elle juge nécessaire entre le dossier que constitue une institution ou un établissement à propos d’une personne dont elle a la charge et les notes personnelles et données brutes du psychologue, qui constituent un matériel de travail. La commission appuie sa réflexion sur les deux articles suivants du code : Article 15 : «Le psychologue dispose sur le lieu de son exercice professionnel d'une installation convenable, de locaux adéquats pour permettre le respect du secret professionnel, et de moyens techniques suffisants en rapport avec la nature de ses actes professionnels et des personnes qui le consultent. » Article 20 : «Le psychologue connaît les dispositions légales et réglementaires issues de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. En conséquence, il recueille, traite, classe, archive et conserve les informations et données afférentes à son activité selon les dispositions en vigueur.» Tenu au respect du secret professionnel, le psychologue est fondé à refuser que des données nominatives confidentielles issues de sa pratique soient divulguées. Quelles sont les conséquences de cette règle générale pour les documents issus de la pratique de l’examen psychologique ?
- La commission se prononce clairement sur le fait que les feuilles de notation, les protocoles de tests, au même titre que les notes prises par le psychologues durant des entretiens, les dessins qui lui sont confiés ou les notes préparant le travail de synthèse constituent des documents de travail, des supports sur lesquels le psychologue s’appuie pour émettre un avis et/ou élaborer un compte rendu,
- La commission répond donc à la demandeuse qu’elle respecte le code de déontologie en considérant que ces documents de travail constituent « les informations et données afférentes à son activité » comme le dit l’article 20 : ils ne sont donc pas transmissibles.
La commission se permet ici de préciser son avis concernant la question de la communication des données brutes (réponses des sujets, listes de résultats chiffrés) : a - Elles n’ont aucun sens à être consultées par des tiers sans formation, et comportent même des dangers d’utilisation abusive. Article 17 : «La pratique du psychologue ne se réduit pas aux méthodes et aux techniques qu’il met en œuvre. Elle est indissociable d’une appréciation critique et d’une mise en perspective théorique de ces techniques ».
b - les protocoles de tests, voire même seulement les pages récapitulant les diverses notes obtenues aux sub-tests, peuvent être uniquement consultés par des psychologues ou des professionnels susceptibles de les interpréter et qui peuvent en prendre note. - La commission précise que ces documents doivent être conservés dans le bureau du psychologue suivant les recommandations précises de l’article 15.
2 – Quel type d’écrit doit être laissé dans le service?
La commission comprend que la demandeuse se pose ici la question du document écrit qu’elle va laisser dans le dossier de l’enfant constitué dans le cadre de l’établissement qu’il fréquente.Rappelons en premier lieu l’article 14 : «les documents émanant d'un psychologue (attestation, bilan, certificat, courrier, rapport, etc.) portent son nom, l'identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles, sa signature et la mention précise du destinataire », avant d’en référer à l’article 12 qui stipule : «Le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et outils sur lesquels il les fonde, et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel… Lorsque ces conclusions sont présentées à des tiers, elles ne répondent qu'à la question posée et ne comportent les éléments d'ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire.»
En nous parlant de «note succincte et accessible» la demandeuse est-elle en conformité avec cet article du code ? Elle a manifestement le souci de la prudence en considérant sans doute que des aspects techniques et spécifiques sont peu accessibles et compréhensibles par «tout un chacun», voire dangereux. La commission observe la nécessité de préciser cette préoccupation en regard des recommandations contenues dans l’article 12 cité plus haut:
- Cet article rappelle tout d’abord la responsabilité du psychologue en lien avec ses choix techniques dans la conduite de l’examen psychologique. Cette responsabilité s’exerce dans le respect de l’article 19 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions peuvent avoir une influence directe sur leur existence ».
- Cet article met en évidence le travail d’élaboration de ses communications professionnelles que doit effectuer le psychologue, entre les deux exigences que sont l’adaptation à l’interlocuteur et la préservation du secret professionnel : nous retrouvons ici la référence, constante dans le Code, à la protection de la personne qu’il reçoit.
- Face à des tiers, le psychologue présente des conclusions qui ne répondent qu’à la ou les questions qui lui sont posées. Le code rappelle ici une fois de plus le respect de l’intimité de la personne en invitant à ne livrer que le strict nécessaire.
Ainsi la rédaction de chaque compte rendu qu’un psychologue joint au dossier d’un patient doit faire l’objet d’une mise en perspective entre les exigences du secret professionnel, la réponse lisible aux questions posées, des conclusions argumentées, qui ne soient pas réductrices pour la personne concernée.
3- Quels écrits peut exiger la direction de l’établissement ? N’est-ce pas au psychologue de juger de ce qu’il restitue et joint au dossier ? Quelle doit être la conduite du psychologue concernant ses écrits ?
D’une manière générale, comme tout salarié un psychologue doit rendre compte de son activité à son employeur : planning de ses activités, transmissions orales et écrites nécessaires à l’exécution des missions qui lui ont été confiées, etc. Les écrits que peut exiger la direction de l’établissement sont issus des missions pour lesquelles il emploie le psychologue. Si celui-ci est indépendant dans le choix de ses méthodes de travail, comme le rappelle l’article 12 déjà cité, il est important qu’il communique avec son employeur à propos des méthodes et des processus d’élaboration spécifiques du travail psychologique. L’article 8 précise : « Le fait pour un psychologue d’être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à toute entreprise privée ou tout organisme public, ne modifie pas ses devoirs professionnels, et en particulier ses obligations concernant le secret professionnel et l’indépendance du choix de ses méthodes et de ses décisions. Il fait état du Code déontologie dans l’établissement de ses contrats et s’y réfère dans ses liens professionnels ». En ce qui concerne ses écrits professionnels, le psychologue doit communiquer à son employeur les exigences déontologiques qui les encadrent : - le respect de la confidentialité assurée au patient, protégée par le secret professionnel dans la transmission et l’archivage des données brutes et des comptes rendus élaborés, tels qu’ils ont été développés aux points 1 et 2 - La responsabilité du psychologue quant à l’utilisation potentielle de ses écrits : Concernant l’usage des écrits du psychologue, l’article 14 précise que «le psychologue n'accepte pas que d'autres que lui-même modifient, signent ou annulent les documents relevant de son activité professionnelle. »
La commission rappelle ici que les écrits du psychologue ne sont pas un résumé de ses interventions ou des résultats chiffrés qu’il a obtenus : chaque écrit d’un psychologue constitue une élaboration professionnelle répondant à une question posée, elle engage sa responsabilité par delà le choix de ses interventions, des méthodes et des techniques qu’il a mises en oeuvre. Il ne saurait donc y avoir quelque modification que ce soit de cet écrit par un tiers. - - Le recueil du consentement éclairé du patient quant à la transmission des comptes rendus, et quant au partage d’informations dans le cadre du travail d’équipe prévu par le fonctionnement de l’établissement. La commission rappelle le préambule du Code : «le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l'action des psychologues », et le Titre I-1 : Le psychologue «réfère son exercice aux principes …sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il n'intervient qu'avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées». En conséquence, le psychologue n’est pas fondé à produire des écrits individuels sans avoir averti les personnes concernées de ses productions les intéressant personnellement et intimement. Le psychologue doit ici se conformer à l’article 12 qui stipule que «…Les intéressés ont le droit d'obtenir un compte rendu compréhensible des évaluations les concernant, quels qu'en soient les destinataires.» Dans le cas où les écrits concernent des enfants mineurs, la commission rappelle l’article 10 : « la consultation pour des mineurs ou des majeurs protégés par la loi est demandée par un tiers, le psychologue requiert leur consentement éclairé, ainsi que celui des détenteurs de l'autorité parentale ou de la tutelle. » Il revient donc au psychologue de respecter le consentement du détenteur de l’autorité parentale. Il respecte ainsi la loi.
Avis rendu le 18 mai 2007 Pour la CNCDP La Présidente Anne Andronikof
Articles du code cités dans l'avis : Préambule du Code, Titre I-1, Articles 8, 10, 12, 14, 15, 17, 19, 20 |