Année de la demande : 2023 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : - Autonomie professionnelle |
CNCDP, Avis N° 2023 - 06 Avis rendu le 30 septembre 2023 Principes : 3 ; 4 ; 5 ; 6 - Titre I : Exercice professionnel - Articles : 5 ; 13 ; 18 ; 22 Le code de déontologie des psychologues concerne les personnes habilitées à porter le titre de psychologue conformément à la loi n°85-772 du 25 juillet 1985 (JO du 26 juillet 1985). Le code de déontologie des psychologues de 1996 a été actualisé en février 2012, puis en septembre 2021, et c’est sur la base de celui-ci que la Commission rend désormais ses avis. RÉSUMÉ DE LA DEMANDE La demandeuse est l’avocate d’une femme dont l’ex-époux a engagé une procédure pas vus depuis plusieurs années. auprès du Juge aux Affaires Fami liales (JAF), à propos de leurs deux enfants qu’il n’a La demandeuse sollicite la Commission pour avis à propos d’un écrit rédigé par une psychologue. Celle-ci a reçu Monsieur dans le cadre du centre d’accueil d'une association humanitaire, où elle exerce. Ce document, nommé tantôt « attestation », tantôt « certificat », a été remis au JAF par l’avocat de l’ex-conjoint de Madame. La demandeuse met en cause l’écrit de la psychologue, aussi bien sur le fond que la forme, car ne respectant pas certains Principes et articles du Code. Sur le fond, l’avocate argumente son propos en s'appuyant sur une absence de prudence, mesure, discernement et rigueur de la part de la psychologue. Elle lui reproche aussi de ne pas préciser les modalités de son intervention. Elle qualifie ses propos de « mensongers », puisque celle-ci relate des faits qu’elle n’était pas en mesure de constater par elle-même, et n’étant de surcroît pas conformes à la situation réelle. Sur la forme, la demandeuse relève dans l’écrit en question, l’absence de « mentions obligatoires », comme préconisé par le Code. Documents joints : - Copie d’un écrit d’une psychologue - Copie d’un courrier par mail d’un avocat à un autre avocat Page 2 sur 6 AVIS AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné. Les avis sont rendus par l'ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière. La Commission se propose de traiter du point suivant : L’écrit du psychologue exerçant dans le cadre d’une procédure auprès d’un juge aux affaires familiales L’écrit du psychologue exerçant dans le cadre d’une procédure auprès d’un juge aux affaires familiales Dans le cadre de son exercice professionnel, le psychologue peut être amené à rédiger des documents de différente nature. Quel que soit son mode d’activité, il adapte sa façon de répondre à chacune des demandes de façon responsable et autonome, ainsi que le rappelle le Principe 5 : Principe 5 : Responsabilité et autonomie professionnelle « Dans le cadre de sa compétence professionnelle et de la nature de ses fonctions, la·le psychologue est responsable, en toute autonomie, du choix et de l'application de ses modes d’intervention, des méthodes ou techniques qu'elle·il conçoit et met en oeuvre, ainsi que des avis qu’elle·il formule. Elle·il défend la nécessité de cette autonomie professionnelle inhérente à l’exercice de sa profession notamment auprès des usagers, employeurs ou donneurs d’ordre. Au préalable et jusqu’au terme de la réalisation de ses missions, elle·il est attentif·ve à l’adéquation entre celles-ci et ses compétences professionnelles. Elle·il peut exercer différentes missions et fonctions. Il est de sa responsabilité de les distinguer et de faire distinguer leur cadre respectif. » Page 3 sur 6 Dans l’écrit rédigé par la psychologue et présenté à la Commission, les modalités de son intervention n’apparaissent pas clairement. Il est difficile de savoir si cet écrit se rapporte à un entretien ou plusieurs, quels en étaient les objectifs et quelles personnes étaient présentes. La psychologue aurait gagné à montrer plus de précision pour être davantage en accord avec le Principe 6 du Code : Principe 6 : Rigueur et respect du cadre d’intervention « Les dispositifs méthodologiques mis en place par la·le psychologue répondent aux objectifs de ses interventions, et à eux seulement. Les modes d'intervention choisis et construits par la·le psychologue doivent pouvoir faire l'objet d'une explicitation raisonnée et adaptée à son interlocuteur, ou d’une argumentation contradictoire avec ses pairs de leurs fondements théoriques et méthodologiques. » La mention « Certificat pour servir et valoir ce que de droit » qui apparaît à la fin du document laisse à penser que la psychologue n’ignorait pas l’utilisation qui pourrait être faite de son écrit dans le cours de la procédure. Dans ce cas, elle avait la nécessité de prendre en considération l’éventualité d’une telle initiative par un tiers, ainsi que le définit le Principe 3 : Principe 3 : Intégrité et probité « En toutes circonstances, la·le psychologue respecte les principes éthiques, les valeurs d’intégrité et de probité inhérents à l’exercice de sa profession. Elle·il a pour obligation de ne pas exploiter une relation professionnelle à des fins personnelles, religieuses, sectaires, politiques, ou en vue de tout autre intérêt idéologique. Elle·il prend en considération les utilisations qui pourraient être faites de ses interventions et de ses écrits par des tiers. » Son écrit renseigne essentiellement des éléments factuels donnés par l’ex-mari. La Commission rappelle à la demandeuse que les psychologues n’ont ni la possibilité, ni la mission de vérifier des faits qui leur sont rapportés. La tonalité de cet écrit et les faits qui y sont rapportés peuvent sembler en faveur de son patient du fait d’un manque de distanciation de la psychologue. Celle-ci aurait gagné à suivre la préconisations du Principe 4 : Principe 4 : Compétence « La·le psychologue tient sa compétence : Page 4 sur 6 - de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par l’article44 de la loi du 25 juillet 1985 modifiée, relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ; - de l’actualisation régulière de ses connaissances ; - de sa formation à discerner son implication personnelle dans l’approche et la compréhension d’autrui. » Cependant la Commission relève que la psychologue ne met pas en cause la partie adverse, respectant ainsi le souci d’impartialité attendu par l’article 5 : Article 5 : « En toutes circonstances, la·le psychologue fait preuve de mesure, de discernement et d’impartialité. La·le psychologue accepte les missions qu’elle·il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences dans le respect du présent Code. Si elle·il l’estime utile, elle·il peut orienter les personnes ou faire appel à d’autres professionnels. » De plus, lorsque la psychologue formule un avis à propos de la situation, elle se montre en adéquation avec les directives de l’article 13 : Article 13 : « L’évaluation faite par la·le psychologue porte exclusivement sur des personnes qu’elle·il a elle·lui-même rencontrées. La·le psychologue peut s’autoriser à donner un avis prudent et circonstancié dans certaines situations, sans que celui-ci ait valeur d’évaluation. » Le document rédigé par ses soins comporte en en-tête les coordonnées de l’institution dans laquelle elle a reçu son patient. En fin de page, après la mention « Certificat fait pour servir et valoir ce que de droit », figurent son nom, sa signature et la date. Ceci peut être considéré comme une mention de destinataire lorsque figure le nom de la personne à laquelle a été remis le document. Toutefois, contrevenant à la demande du Code, ne sont mentionnés ni son numéro Adéli, ni l’objet, ni le destinataire de cet écrit. La Commission insiste sur l’importance, dans tout document écrit par un psychologue, de faire figurer clairement l’objet, et le destinataire, permettant ainsi de cerner la finalité de l’écrit, ce que rappelle l’article 18 : Page 5 sur 6 Article 18 : « Les documents émanant d’un·e psychologue sont datés, portent son identité, son titre, son numéro d’inscription sur les registres légaux en vigueur, ses coordonnées professionnelles, sa signature ainsi que la·le destinataire et l’objet de son écrit. Seul la·le psychologue auteur·e de ces documents est habilité·e à les signer, les modifier, ou les annuler. Elle·il fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique. » Cet écrit, dans lequel est explicitée une situation complexe sur la base d’éléments d’ordre psychosocial, aurait gagné à aborder la dimension psychologique du vécu du patient, ainsi que la possibilité d’un accompagnement pouvant contribuer à une évolution en se basant sur ses ressources psychologiques, tel que préconisé par l’article 22 : Article 22 : « La·le psychologue est averti·e du caractère relatif de ses évaluations et interprétations et elle·il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Elle·il émet des conclusions contextualisées et non réductrices concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes. » La Commission souligne l’attention particulière que chaque psychologue qui rédige un écrit, a à accorder à la dimension psychologique et, notamment, à son aspect dynamique. Pour la CNCDP Le Président Antony CHAUFTON La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité |
Avis 2023 - 06.pdf |