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RÉSUMÉ DE LA DEMANDE

La Commission est sollicitée par le père d’une enfant de sept ans. La fillette est accueillie par ses parents au rythme d’une garde alternée. Elle bénéficie d’un suivi réalisé par une psychologue, à l’initiative de la mère. Le demandeur signale qu’il n’a été tenu informé du suivi qu’un mois après son démarrage. Dès qu’il a connaissance de l’initiative, le père s’y serait opposée. A l’invitation de la psychologue, il a participé à deux consultations afin d’établir l’anamnèse de l’enfant. Bien que coopérant aux échanges lors de ces entretiens, il continue à manifester son désaccord. Au cours de sa prise en charge, la psychologue aurait rédigé une Information Préoccupante (IP) au sujet d’éléments de danger concernant l’enfant au domicile de son père. Ce dernier souligne que la mère a pris des dispositions pour qu’il n’accueille plus sa fille depuis lors et qu’une ordonnance de protection a été rédigée par un Tribunal Judiciaire.

Le demandeur dénonce une « faute professionnelle » et le « manque de déontologie et de précautions » de la psychologue. Il saisit la Commission pour « dénoncer les pratiques » de la professionnelle et lui demande « de bien vouloir [se] positionner sur ce cas ».

Documents joints :

  • Copie d’un formulaire CERFA (Centre d'Enregistrement et de Révision des Formulaires Administratifs) intitulé « Attestation » et rédigé par la compagne du demandeur
  • Copie d’un acte d’huissier de justice intitulé « Procès-verbal de constat »
Posté le 15-08-2023 17:50:27

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2022

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Signalement

Questions déontologiques associées :

- Autonomie professionnelle
- Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
- Consentement éclairé
- Discernement
- Impartialité
- Respect de la loi commune
- Responsabilité professionnelle
- Spécificité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Pratique du psychologue auprès d’un mineur dans le contexte d’une séparation conflictuelle

 

Pratique du psychologue auprès d’un mineur dans le contexte d’une séparation conflictuelle

En préambule, la Commission indique qu’elle a pour vocation d’émettre des avis consultatifs au regard du Code de déontologie des psychologues. En aucun cas, elle ne peut prendre la place d’une instance judiciaire à qui peut être adressée une plainte pour « dénoncer » des faits afin d’engager une procédure judiciaire.

La complexité d’un contexte de séparation entre parents d’enfants mineurs, en particulier lorsqu’elle est conflictuelle, ainsi que la vulnérabilité propre à la condition d’enfant incitent le psychologue à inscrire sa pratique dans le respect des Principes 1 et 3 :

Principe 1 : Respect des droits fondamentaux de la personne

« La·le psychologue réfère son exercice aux libertés et droits fondamentaux garantis par la loi et la Constitution, par les principes généraux du Droit communautaire et par les conventions et traités internationaux. Elle·il exerce dans le respect de la personne, de sa dignité et de sa liberté.

La·le psychologue s'attache à respecter l'autonomie de la personne et en particulier son droit à l'information, sa liberté de jugement et de décision. Toute personne doit être informée de la possibilité de consulter directement la·le psychologue de son choix. »

Principe 3 : Intégrité et probité

« En toutes circonstances, la·le psychologue respecte les principes éthiques, les valeurs d’intégrité et de probité inhérents à l’exercice de sa profession. Elle·il a pour obligation de ne pas exploiter une relation professionnelle à des fins personnelles, religieuses, sectaires, politiques, ou en vue de tout autre intérêt idéologique. Elle·il prend en considération les utilisations qui pourraient être faites de ses interventions et de ses écrits par des tiers »

 

Soulignons que le psychologue définit le cadre et l’objectif de son intervention. Le choix des outils, des méthodes mais aussi de ses interventions lui appartient tel que le stipule le Principe 5 :

Principe 5 : Responsabilité et autonomie professionnelle

« Dans le cadre de sa compétence professionnelle et de la nature de ses fonctions, la·le psychologue est responsable, en toute autonomie, du choix et de l'application de ses modes d’intervention, des méthodes ou techniques qu'elle·il conçoit et met en œuvre, ainsi que des avis qu’elle·il formule. Elle·il défend la nécessité de cette autonomie professionnelle inhérente à l’exercice de sa profession notamment auprès des usagers, employeurs ou donneurs d’ordre. Au préalable et jusqu’au terme de la réalisation de ses missions, elle·il est attentif·ve à l’adéquation entre celles-ci et ses compétences professionnelles. Elle·il peut exercer différentes missions et fonctions. Il est de sa responsabilité de les distinguer et de faire distinguer leur cadre respectif. »

 

Par ailleurs, pour lui permettre d’établir son intervention auprès d’un mineur, le psychologue doit porter son attention aux préconisations de l’article 12 afin d’instaurer les conditions d’une relation respectueuse dans le cadre d’un suivi :

Article 12 : « La·le psychologue recevant un·e mineur·e, un·e majeur·e protégé·e, une personne vulnérable ou dont le discernement est altéré ou aboli, tient compte de sa situation, de son statut et des dispositions légales ou réglementaires en vigueur. Lorsque la personne n’est pas en capacité d’exprimer son consentement, la·le psychologue s’efforce de réunir les conditions d'une relation respectueuse. »

 

Ajoutons que le psychologue se montre particulièrement attentif lorsqu’il intervient à la demande d’un seul parent, notamment dans un contexte de séparation parentale conflictuelle. Afin de poser le cadre d’un suivi avec un mineur, le psychologue recherche ainsi l’accord des parents et le consentement de l’enfant concerné comme le recommande l’article 11 :

Article 11 : « Dans le cadre d’une pratique auprès d’un·e mineur·e, la·le psychologue s’assure autant que possible de son consentement. Elle·il recherche l'autorisation des représentants légaux dans le respect des règles relatives à l'autorité parentale. »

 

De façon générale, le psychologue recherche le consentement des personnes qui viennent le consulter dans le cadre d’un suivi mais aussi d’une évaluation ou d’une expertise comme le souligne l’article 9 :

Article 9 : « La·le psychologue recherche systématiquement le consentement libre et éclairé de ceux qui la·le consultent ou qui participent à une évaluation ou une expertise. Elle·il les informe de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, du coût éventuel et des limites de son intervention. Le cas échéant, elle·il leur indique la possibilité de consulter un·e autre praticien·ne. »

 

Le choix réalisé par la psychologue de rédiger une IP peut répondre à l’indication faite par le Code d’évaluer la conduite à tenir en cas de risque d’atteinte à l’intégrité psychique d’une personne, en l’occurrence d’une mineure, comme indiqué dans l’article 17 :

Article 17 : « Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui la.le consulte ou à celle d’un tiers, la.le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir. Elle.il le fait dans le respect du secret professionnel et des dispositions légales relatives aux obligations de signalement. La.le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil, notamment auprès de confrères ou consœurs expérimenté.e.s. »

Lorsqu’il fait le choix de rédiger un écrit, le psychologue fait preuve de vigilance s’il transmet des informations et des conclusions à un tiers comme l’article 15 le stipule :

Article 15 : « Le psychologue présente ses conclusions de façon claire et adaptée à la personne concernée. Celles-ci répondent avec prudence et discernement à la demande ou à la question posée.

Lorsque ces conclusions sont transmises à un tiers, elles ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. L’assentiment de la personne concernée ou son information préalable est requis. »

 

Si l’assentiment ou l’information de l’usager concerné par l’écrit est requis, certaines circonstances conduisent le psychologue à faire le choix de ne pas informer les personnes présentées comme pouvant être auteurs d’actes portant atteinte à l’enfant afin d’éviter tout préjudice supplémentaire à ce dernier.

La Commission rappelle enfin que si les magistrats peuvent fonder leurs jugements sur les appréciations fournies par différents spécialistes, ils restent toutefois responsables des décisions prises au sein d’un Tribunal Judiciaire.

 

Pour la CNCDP

Le Président

Antony CHAUFTON

 

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

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