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RÉSUMÉ DE LA DEMANDE

La demande émane d’un homme, père de deux enfants, actuellement en instance de divorce. Suite à la décision d’un Juge aux Affaires Familiales (JAF), les parents ont provisoirement la garde partagée des enfants. Le demandeur précise que son ex-épouse a entamé une procédure de divorce pour faute et une procédure « d’ordonnance de protection ». Elle l’accuserait de « violences psychologiques et de harcèlement ». Dans ce contexte, une « attestation psychologique » rédigée par une psychologue a été jointe au dossier.

Le demandeur s’interroge sur le contenu de cette « attestation », qu’il juge diffamatoire à son égard, et adresse plus précisément deux questions à la Commission :

- La psychologue ne l’ayant jamais rencontré, pouvait-elle émettre un avis le concernant ?

- La psychologue aurait reçu ses enfants sans avoir jamais demandé son accord. Or, le consentement des deux parents n’est-il pas indispensable dans le cadre d’un suivi de mineurs ?

Document joint :

Copie d’un document intitulé « attestation psychologique » portant en-tête d’une association de planning familial et tamponné du cachet d’un avocat.

Posté le 12-10-2021 22:41:03

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2020

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

- Autonomie professionnelle
- Discernement
- Impartialité
- Respect de la personne
- Respect du but assigné
- Responsabilité professionnelle

La Commission se propose de traiter du point suivant :

  • Intervention du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire entre parents.

Intervention du psychologue dans le cadre d’une procédure judiciaire entre parents.

Lors d’une prise en charge, le psychologue peut être amené, à son initiative ou à la demande d’un tiers, à rédiger des documents de diverses natures. Ceux-ci relèvent d’un acte professionnel engageant la responsabilité du professionnel au sens du Principe 3 du Code :

Principe 3 : Responsabilité́ et autonomie

« Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité́ professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l'application des méthodes et techniques qu'il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule. Il peut remplir différentes missions et fonctions : il est de sa responsabilité́ de les distinguer et de les faire distinguer. »

Quel que soit son objet ou encore le contexte dans lequel il est rédigé, l’écrit d’un psychologue nécessite de prendre en considération l’usage qui peut en être fait, notamment la transmission à un tiers comme le rappelle l’article 17 :

Article 17 : « Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire ».

 

Dans le cas présent, le document soumis pour avis à la Commission se présente sous la forme d’une « attestation psychologique » établie par une psychologue « pour servir et faire valoir ce que de droit ». L’établissement de ce document semble avoir été fait à la demande de l’ex-épouse du demandeur, que la psychologue reçoit régulièrement.

Ladite « attestation » présente dans son entête quelques-unes des caractéristiques mentionnées à l’article 20 du Code, mais n’y sont mentionnés ni son objet et ni le numéro ADELI de la professionnelle :

Article 20 : « Les documents émanant d'un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l'identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l'objet de son écrit et sa signature. Seul le psychologue auteur de ces documents est habilité à les modifier, les signer ou les annuler. (…)»

Dans cette « attestation », la psychologue a pris la décision de formuler dans cette « attestation » un avis quant aux relations filiales qu’entretiendrait le demandeur avec ses deux enfants, et qui devraient être, selon elle, « limitées ». Elle justifie cette recommandation par le fait que le père est un « manipulateur » et qu’il est à l’origine de « violences psychologiques » à l’égard de la mère. Ce comportement serait à l’origine de « stress relationnel, d’angoisse, de troubles somatiques », aussi bien chez la mère que chez les deux enfants.

L’emploi du présent et non du conditionnel dans cette attestation dénote, au regard de la Commission, un manque de prudence et d’impartialité, auxquels invite pourtant le Principe 2 :

            Principe 2 : Compétence

« […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité. »

Par ailleurs, la psychologue ne semble pas avoir tenu compte des recommandations des articles 13 et 25 du Code. En effet, en prenant appui sur les éléments recueillis auprès de la mère, sans avoir, semble-t-il, rencontré le père, elle a pu manquer de mise en perspective critique de ses appréciations concernant la dynamique familiale :

Article 13 : « Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu'il a pu lui-même examiner ».

 

Article 25 : « Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il prend en compte les processus évolutifs de la personne. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives concernant les ressources psychologiques et psychosociales des individus ou des groupes ».

Le demandeur interroge la Commission sur le fait que la psychologue a, selon lui, « suivi » ses enfants, sans l’en avoir informé, ni sollicité son accord. Il est fréquent qu’un seul parent soit présent lors d’un premier entretien. L’autre parent est réputé avoir consenti, sauf s’il manifeste explicitement son désaccord, comme l’évoque l’article 11 :

Article 11 : « L’évaluation, l’observation ou le suivi au long cours auprès de mineurs ou de majeurs protégés proposés par le psychologue requièrent outre le consentement éclairé de la personne, ou au moins son assentiment, le consentement des détenteurs de l'autorité parentale ou des représentants légaux. »

Dans le cas présent, alors que l’écrit précise que la mère est « suivie en consultations psychologiques pour problèmes conjugaux », il n’est pas précisé si la psychologue a rencontré les enfants. Il est donc difficile de discuter ce point ici.

En conclusion, au vu de la complexité des situations de séparation parentale donnant lieu à des procédures judiciaires, la Commission insiste sur le fait que le psychologue doit s’efforcer de faire reconnaitre et respecter à la fois les parents et leurs enfants dans leurs dimensions psychiques, comme le stipule l’article 2 en rappel du Frontispice du Code. Il s’applique à suivre cela aussi bien dans son intervention que dans la rédaction d’écrits permettant de rendre compte d’un suivi psychologique :

Article 2 : « La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur les composantes psychologiques des individus considérés isolément ou collectivement et situés dans leur contexte. »

Frontispice : « Le respect de la personne dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l'action des psychologues. »

 

Pour la CNCDP

La Présidente

Michèle GUIDETTI

La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur.

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