Les demandeurs sont les parents d'un adolescent scolarisé en terminale dans un lycée privé. Au cours de l’année scolaire, celui-ci a bénéficié de la mise en place, d'un Projet d'Accueil Individualisé (PAI). Dans ce cadre, le jeune a rencontré la psychologue de l’établissement, avant et après la réunion de mise en place du PAI. Ce projet permet qu'une attention particulière soit portée dans un établissement à un jeune souffrant de troubles de la santé persistants, afin de favoriser au mieux son intégration au sein de celui-ci. Dans le cas présent, le PAI devait permettre des aménagements de la scolarité de l'élève en raison de troubles anxieux.
Cette demande se fait dans un contexte très conflictuel entre les parents et les professionnels du lycée. L'année précédente, les parents avaient demandé une enquête administrative pour une erreur de procédure au cours d'un examen, erreur qui avait plongé le jeune dans un profond désarroi. Depuis, l'adolescent est suivi par un psychologue en libéral, qui a participé lui aussi à la mise en place du PAI. Après sa rencontre avec l'adolescent, la psychologue de l'établissement s’est entretenue avec les parents par téléphone. Au cours de cet échange, elle a émis des réserves sur « l'origine scolaire » des troubles. Dans le cadre de la réunion de mise en place du PAI, elle est intervenue dans le même sens.
L'adolescent a ensuite très mal vécu un deuxième entretien qu'elle a eu avec lui quelques semaines plus tard, au cours duquel elle s'est « positionnée en tant que porte-parole du lycée », en utilisant l'entretien « pour (lui) faire une leçon de morale».
Les demandeurs interrogent la Commission sur la position professionnelle de cette psychologue, qui a utilisé « son statut de psychologue pour porter la position du lycée au motif qu'elle est mandatée par lui ». Ils questionnent également la Commission sur les règles de déontologie qu'elle aurait dû respecter, notamment « au regard des droits des personnes, de la confidentialité, de la rigueur, du but assigné et de l'aide qu'elle était censée apporter ». Ils demandent enfin si la psychologue « pouvait faire un compte rendu oral à la direction du lycée » sans qu'ils en soient informés.
Documents joints :
- Copie du Projet d'Accueil Individualisé (PAI),
- Copie d'une attestation du psychologue exerçant en libéral,
- Copie des courriers échangés entre les parents et le proviseur du lycée,
- Copies des courriers échangés entre l'avocat des parents et les avocats du lycée,
- Copie d'un courrier du rectorat aux parents,
- Copie d'un document portant sur le fonctionnement du service de psychologie scolaire du diocèse,
- Copie d'un courrier de la psychologue de l'établissement et adressé aux parents via le chef d'établissement.
Année de la demande : 2015 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : - Transmission de données psychologiques (Compte rendu à un service administratif avec accord et/ou information de l’intéressé)
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A la lecture de la demande et des documents joints, la Commission se propose de traiter le point suivant : - Le positionnement du psychologue exerçant en établissement scolaire : coordination des actions au sein de la communauté éducative, relations avec les élèves et les parents.
Le positionnement du psychologue exerçant en établissement scolaire : coordination des actions au sein de la communauté éducative, relation avec les élèves et les parents. Le contexte d’exercice du psychologue définit en partie ses missions. Dans l’institution scolaire, les équipes travaillent en concertation afin d’aider au mieux les élèves dans les processus d’acquisitions scolaires mais aussi de maturation et de socialisation. Le psychologue fait partie de la communauté éducative. A ce titre, il peut être amené à rencontrer des élèves et également, dans le contexte de ces interventions, des enseignants, des membres de la direction et d’autres partenaires institutionnels de l’établissement. Ses interventions auprès des élèves se font dans le respect du but assigné, qui porte ici sur un accompagnement et un soutien à la scolarité. Principe 6 : Respect du but assigné Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions, et à eux seulement. En construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue prend notamment en considération les utilisations qui pourraient en être faites par des tiers. Dans la situation exposée, la mise en place d’un PAI au cours d’une réunion nécessite l’intervention de plusieurs professionnels qui ont à examiner la situation, à rencontrer l’élève et ses parents avec l’objectif principal d’accompagner le parcours de l’adolescent dans son établissement. Il est ainsi pertinent que des informations et des données soient échangées à ce niveau pour une complémentarité et une articulation des interventions. Si la confidentialité s’impose pour tous les membres, elle ne doit pas empêcher la mise en œuvre des mesures proposées au sein de la communauté éducative. Dans l'élaboration d'un PAI pour un adolescent présentant des troubles anxieux, l’avis du psychologue est d’autant plus recherché. Néanmoins, dans un tel contexte, le psychologue ne délivre que les informations qu’il estime nécessaires à une meilleure appréhension et évolution de la situation et il en informe les parents au préalable. Article 8 : Lorsque le psychologue participe à des réunions pluri professionnelles ayant pour objet l'examen de personnes ou de situations, il restreint les informations qu’il échange à celles qui sont nécessaires à la finalité professionnelle. […] Si plusieurs psychologues, à des titres divers, interviennent auprès d’une même personne, ici auprès du jeune homme, et qu’ils sont amenés à participer à une réunion pluri professionnelle le concernant, il est souhaitable qu’ils puissent échanger sur la situation. Dans le cas présent, il semble que cela n’a pu être possible du côté de la psychologue en institution comme de celui du psychologue qui suivait l’adolescent en pratique libérale. Article 31 : Lorsque plusieurs psychologues interviennent dans un même lieu professionnel ou auprès de la même personne, ils se concertent pour préciser le cadre et l'articulation de leurs interventions.
L’entretien qui a eu lieu ultérieurement avec l’élève au sein de l’établissement contribue au suivi de la mise en place du PAI. Ici la position de la psychologue est différente de celle du psychologue en libéral qui fait un travail de suivi psychologique et d’accompagnement avec l’adolescent. Ce dernier peut vivre de manière différente voire même contradictoire ces rencontres dans des contextes différents. Il est alors d’autant plus nécessaire de recueillir le consentement libre et éclairé du jeune comme l’indique l’article 9 du Code. Ce consentement porte sur les modalités de l’entretien mais aussi sur les objectifs et la finalité de celui-ci. Si le psychologue prévoit de transmettre des informations dans le cadre institutionnel, le jeune doit en être informé. Article 9 : Avant toute intervention, le psychologue s'assure du consentement libre et éclairé de ceux qui le consultent ou qui participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il a donc l’obligation de les informer de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, des limites de son intervention et des éventuels destinataires de ses conclusions.
Le jeune est partie prenante de ce processus, au regard de son âge et de son degré de maturité. Si dans le cas présent, l’adolescent a pu avoir le sentiment d’être confronté à des points de vue professionnels très différents, il est en droit de demander un nouvel entretien, afin d’exprimer ce qui rend cette situation difficile pour lui et de mieux la comprendre. En effet, d’un point de vue déontologique, le psychologue est tenu d'accéder à une telle demande, afin de respecter l'autonomie de la personne concernée. C'est d'autant plus vrai ici compte tenu de l’âge et de la maturité du jeune.
Principe 1 : Respect des droits de la personne […] Il (le psychologue) s’attache à respecter l’autonomie d’autrui et en particulier ses possibilités d’information, sa liberté de jugement et de décision. Il favorise l’accès direct et libre de toute personne au psychologue de son choix […]. Pour la CNCDP La Présidente Catherine MARTIN |
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