La requérante est une psychologue clinicienne, psychanalyste exerçant en libéral. Elle fait appel à la CNCDP pour des problèmes concernant une personne qui se dit psychologue et qui propose ses services exclusivement à domicile : la requérante joint la photocopie du « prospectus » qu’elle a « découvert affiché » dans plusieurs endroits du village (commerces essentiellement).
Les interrogations de la requérante portent sur plusieurs points et ses questions sont formulées de façon très précise :
- « Je souhaite savoir si cette personne est autorisée à faire usage professionnel du titre ou pas ? »
- « Que sous entend psychologue D.E ? » (Titre qui apparaît dans le « prospectus »)
- « Dans le cas peu probable où elle serait autorisée, puis-je exiger qu’il soit fait mention de la nature exacte de son diplôme ? »
- « Je souhaite vos conseils avisés, voire une intervention efficace auprès de cette personne qui donne une image inhabituelle de la profession. » :
La requérante mentionne :
- Que cette personne travaille en libéral « exclusivement au domicile privé des personnes (est-ce possible ?) »
- Qu’elle pose un « problème de concurrence déloyale. »
- Qu’elle « n’indique pas de n° de SIRET. »
La requérante nous dit adresser une lettre identique à un syndicat de psychologues.
Elle joint à sa lettre trois documents :
- Des prospectus proposant « des consultations de psychologie à domicile. »
- Sa carte professionnelle.
- Le document listant ses diplômes et ses « prestations de psychologie et de conseil. ».
Année de la demande : 2002 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : - Confraternité entre psychologues
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La commission ne se prononcera pas sur les divers aspects commerciaux des pratiques libérales et sur les offres publicitaires faites par la personne mise en cause. Elle rappellera les deux articles du code qui traitent des relations entre les psychologues : - Article 22 : « Le psychologue respecte les conceptions et les pratiques de ses collègues pour autant qu’elles ne contreviennent pas aux principes généraux du présent code ; ceci n’exclut pas la critique fondée. » La commission répondra sur les trois points suivants : - Le titre de psychologue. 1) Le titre de psychologue La question de la requérante sur ce point est précise : « J’interviens aujourd’hui auprès de vous pour vous demander de vérifier la légalité de l’usage professionnel du titre de psychologue de la personne dont les coordonnées figurent sur le prospectus ci-joint », personne qui s’est présentée comme étant « psychologue à domicile ». L’Article 1 du Code de déontologie des psychologues précise que « l’usage du titre de psychologue est défini par la loi n° 85772 du 25 juillet 1985 publiée au J.O du 26 juillet 1985. Sont psychologues les personnes qui remplissent les conditions de qualifications requises dans cette loi . Toute forme d’usurpation du titre est passible de poursuites. ». Le décret n° 90.255 du 22 mars 1990 fixe la liste des diplômes permettant de faire usage professionnel du titre de psychologue. Ces documents peuvent être obtenus sur simple demande au Journal Officiel. En l’absence d’une liste officielle des psychologues, il appartient à la requérante de vérifier auprès de la professionnelle se déclarant « psychologue » si elle est titulaire des diplômes lui permettant de faire usage du titre . Concernant l’interrogation de la requérante sur la notion de « psychologue D.E » rappelons que cette formulation n’est pas identifiante pour la profession . 2) La nature des pratiques citées et l’exercice professionnel à domicile « Outre mes doutes quant au respect des dispositions légales et réglementaires pour cette personne, les méthodes employées ne me paraissent pas dignes du code de déontologie. » dit la requérante. Sa principale interrogation porte sur l’exercice de la profession et les modalités d’intervention : il s’agit de savoir si l’exercice d’une psychologue au domicile des usagers est possible et conforme au Code de déontologie. Rien n’indique que les consultations au domicile des usagers soient contraires au Code qui n’aborde pas directement ce point. Il y a actuellement de plus en plus de domaines où le psychologue est susceptible de se rendre au domicile des clients ou sur les lieux mêmes d’événements ayant des conséquences psychologiques. Lorsque tel est le cas, ce fonctionnement appelle à la plus grande prudence et le psychologue doit fonder sa pratique sur des bases théoriques reconnues scientifiquement ; cette pratique exige une grande vigilance afin de maintenir la distance psychique nécessaire au respect de la personne humaine. Certains articles du Code peuvent toutefois nous éclairer dans l’appréciation de cette situation : a) Les Articles 3 et 7 concernant la responsabilité et l’indépendance professionnelle qui conduisent à considérer que le psychologue est libre de choisir les modalités de ses interventions : - L’article 3 : « Dans le cadre de ses compétences professionnelles, le psychologue décide du choix et de l’application des méthodes et techniques psychologiques qu’il conçoit et met en œuvre. Il répond donc personnellement de ses choix et des conséquences directes de ses actions et avis professionnels. » b) Mais ces modalités d’interventions doivent se faire : - Dans le respect de la personne : : « Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection…Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel. » (Article 1) - Selon le principe de compétence : (Article 2 ) : « Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières et définit ses limites propres, compte tenu de sa formation et de son expérience. Il refuse toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises. » Dans ce cadre fixé par ces principes généraux, l’Article 15 apporte des précisions sur les conditions de l’exercice de la profession : « Le psychologue dispose sur le lieu de son exercice professionnel d’une installation convenable, de locaux adéquats pour permettre le respect du secret professionnel, et de moyens techniques suffisants en rapport avec la nature de ses actes professionnels et des personnes qui le consultent. ». De ce point de vue, le fait de se rendre exclusivement au domicile des usagers et donc de s’interdire de faire certaines interventions dans un bureau adapté peut rendre difficile voire impossible le respect de cet article : secret professionnel, neutralité du lieu, moyens techniques insuffisants (notamment pour la passation des tests). L’intervention au domicile des usagers ne peut donc pas être généralisée et ne peut pas concerner tous les actes. 3) Les coordonnées professionnelles d’un psychologue Le fait que la psychologue mise en cause n’ait pas d’adresse, mais un simple numéro de téléphone portable peut avoir une incidence négative sur l’organisation professionnelle. L’Article 14 stipule en effet que : « Les documents émanant d’un psychologue portent son nom, l’identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles. » Enfin, dans l’organisation de son travail, le psychologue se doit d’être en conformité avec le devoir de probité tel qu’il est défini dans l’Article 4 du Code.
ConclusionLa commission ne relève pas de manquements flagrants au Code, mais les éléments fournis mettent en lumière des pratiques problématiques qui peuvent entraîner des confusions plus ou moins graves en ce qui concerne l’image de la profession auprès du public en général et des usagers en particulier. Le fait que la psychologue se rende exclusivement au domicile des usagers ne constitue pas en soi un non-respect du Code de déontologie, mais rappelons que quelles que soient les conditions d’exercice professionnel et ses contraintes, le psychologue se doit de respecter et de faire respecter la dimension psychique des personnes. Pour la CNCDP |
Avis 02-31.doc |