La requérante est une psychologue clinicienne exerçant en service ambulatoire de soins psychiatriques. Elle s’adresse à la Commission pour avoir un avis sur « une difficulté concernant la prise en charge d’une patiente qui interpelle [sa] responsabilité professionnelle. » La requérante demande « avis et conseil pour connaître quelle position adopter sur le plan éthique et déontologique ».
- La requérante se demande « comment réagir vis-à-vis du médecin référent et d’[une] patiente » dont elle décrit la situation et l’évolution. Cette patiente, suivie par la requérante en psychothérapie « sur prescription médicale » lui a rapporté des propos qui auraient été tenus par un médecin au cours d’une consultation médicale. La requérante qui qualifie ces propos de « violents et intrusifs (définis comme un viol psychique) » s’est « positionnée verbalement » en indiquant à la patiente que « cette situation et cette séance (consultation médicale) ne sont pas saines et normales de la part d’un médecin ».
-La requérante pense que « la situation institutionnelle (..) ne [lui] permet guère de verbaliser directement ce problème avec le chef de service ni avec l’équipe médicale ». Elle estime que, dans des conflits répétés entre le médecin chef de service et l’ensemble des psychologues, celles-ci « vivent de manière aléatoire des attaques » et que cela est cause de départs répétés.
-Des sanctions à l’encontre d’une des psychologues seraient le fait d’un « acharnement » de la part du chef de service. Il aurait mis en cause le nombre et la durée des entretiens de cette psychologue ainsi que l’absence de « compte-rendu écrit de l’intégralité de ses entretiens cliniques dans le dossier médical » pour justifier ces sanctions.
Année de la demande : 2002 Demandeur : Contexte : Objet de la demande : Questions déontologiques associées : - Spécificité professionnelle
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Plusieurs questions de la requérante sont hors du champ de compétence de la Commission. Il en va ainsi de l’éthique (qui est de la responsabilité de chaque sujet) et des conseils sur la pratique individuelle ou institutionnelle (qui sont du domaine de la supervision). La Commission traitera cependant le dossier sur deux aspects, qui lui paraissent relever de la déontologie : 1- le positionnement de la requérante vis-à-vis des propos que sa patiente lui rapporte, en termes de relations avec les autres professionnels. 2 – les comptes rendus écrits de l’intégralité des entretiens cliniques faits par les psychologues dans le dossier médical. 1- Sur le point du positionnement pris par la requérante, on peut noter qu’il est souhaitable, comme elle le note elle-même, que la requérante parvienne à un échange avec le médecin concerné, sur la base de sa préoccupation concernant les effets sur la patiente des propos qu’il aurait tenus. La Commission constate qu’un tel échange est compromis par le jugement porté a priori sur le comportement professionnel du médecin, jugement effectué sur la base d’un report indirect de ses propos tels que la patiente les a entendus. Le « positionnement verbal » de la psychologue vis-à-vis de la patiente contrevient en outre à la recommandation de l’Article 6 du Code de déontologie des psychologues qui stipule : « Le psychologue fait respecter la spécificité de son exercice et son autonomie technique. Il respecte celles des autres professionnels ». 2- La question du compte rendu intégral des entretiens cliniques s’apparente au problème du statut des notes personnelles, déjà abondamment traité par la Commission. La Commission constate qu’un psychologue qui accepterait de « rendre compte par écrit dans le dossier médical de l’intégralité de ses entretiens cliniques » serait en contradiction avec l’obligation qui est faite par le Titre I.1 concernant le secret professionnel : « Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » A cet égard, le psychologue doit être vigilant et prendre en considération, en communiquant par écrit ou oral, la question des « utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers » - ce que le Titre I.6 lui enjoint de faire pour chacune de ses interventions. La Commission rappelle l’obligation de respect du Code par tout psychologue, indépendamment du contexte de travail (privé, public) et du statut (titulaire, sous contrat). En effet, l’Article 8 stipule que « Le fait pour un psychologue d’être lié dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à toute entreprise privée ou tout organisme public, ne modifie pas ses devoirs professionnels, et en particulier ses obligations concernant le secret professionnel et l’indépendance du choix de ses méthodes et de ses décisions. Il fait état du code de déontologie dans l’établissement de ses contrats et s’y réfère dans ses liens professionnels. » La requérante peut enfin solliciter ses confrères psychologues pour en obtenir aide et conseil, notamment en matière déontologique. Car ils ont le devoir de la soutenir comme le recommande l’Article 21 : « Le psychologue soutient ses collègues dans l’exercice de leur profession et dans l’application et la défense du présent code. Il répond favorablement à leur demande de conseil et les aide dans les situations difficiles, notamment en contribuant à la résolution des problèmes déontologiques. » Pour la CNCDP |
Avis 02-29.doc |