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 RESUME DE LA DEMANDE
Une mère, en cours de séparation, sollicite l’avis de la CNCDP au sujet d’une attestation concernant  son enfant rédigée par une psychologue à la demande du père et versée au dossier de la procédure de divorce.
Cette attestation, délivrée après avoir reçu l’enfant sans que la mère en soit informée, visait une modification du droit de visite.
La demandeuse estime, tout d’abord, que « la psychologue porte une appréciation erronée sur l’ordonnance de non conciliation ». Elle considère ensuite que son consentement n’a pas été requis et qu’elle n’a pas pu faire part de ses observations pour la consultation de sa fille, alors que l’autorité parentale est exercée conjointement. Elle conteste les « conclusions réductrices et définitives » de la psychologue sur ses capacités à être parent, à partir de courriels échangés entre père et mère, ainsi que « le diagnostic » porté sur ses relations mère/enfant.
Cette mère conclut en s’interrogeant sur les pouvoirs de la CNCDP à « mettre un terme à de tels agissements » et demande, au moins, un avis sur « le comportement de cette psychologue ».

Documents joints :

  1. Copie de l’attestation de la psychologue
  2. Copie du compte rendu d’audience de conciliation
  3. Copie de l’Ordonnance de non-conciliation
Posté le 15-11-2011 15:58:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2010

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

- Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
- Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels (identification du psychologue, du destinataire))
- Respect du but assigné
- Traitement équitable des parties
- Évaluation (Évaluation de personnes que le psychologue n’a pas rencontrées)
- Évaluation (Relativité des évaluations)
- Évaluation (Droit à contre-évaluation)
- Consentement éclairé

Comme il est indiqué dans le Préambule, la CNCDP, instance consultative, n’a pas pouvoir de sanction à l’égard des psychologues. Son rôle est de donner des avis motivés, au regard du Code de Déontologie, sur la conduite générale à tenir, pour les psychologues, au regard des situations exposées.
Face à la demande présentée ici, la CNCDP se propose de traiter des points suivants :

  1. Les règles déontologiques concernant l’autorité parentale pour la consultation d’un psychologue
  2. La question des attestations
  3. L’évaluation de personnes que le psychologue n’a pas rencontrées
  4. La relativité des évaluations

Les règles déontologiques concernant l’autorité parentale pour la consultation d’un psychologue :

La Commission a fréquemment été sollicitée pour traiter de cette question dans le cadre d’une séparation des parents.
Seul l’article 10 du Code évoque l’autorité parentale, mais n’aborde pas directement la situation particulière de parents séparés dont l’un déciderait seul d’une consultation, pour leur enfant, chez un psychologue :
Article 10 – Le psychologue peut recevoir, à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi. Son intervention tient compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales en vigueur. Lorsque la consultation pour des mineurs ou des majeurs protégés par la loi est demandée par un tiers, le psychologue requiert leur consentement éclairé, ainsi que celui des détenteurs de l’autorité parentale ou de la tutelle.

De fait, deux questions sont posées dans la situation exposée :

  1. Le parent non demandeur de la consultation doit-il en être informé ?
  2. Son consentement préalable doit-il être requis ?

La Commission a estimé, dans des avis précédents, qu’une simple consultation, auprès d’un enfant, pouvait être demandée par un seul des parents jouissant de l’autorité parentale conjointe, chaque parent étant réputé agir avec l’accord de son conjoint et pour le bien de l’enfant. Par contre, un acte inhabituel ou un accompagnement psychologique nécessitent le consentement explicite du parent non demandeur, dans l’intérêt même de l’enfant.

La question des attestations

Toute personne peut demander à un professionnel une attestation faisant état d'éléments constatés au cours d’une consultation. Si le psychologue accepte de  délivrer une telle attestation, celle-ci comprendra les éléments indiqués à l’article 14 :
Article 14 – Les documents émanant d’un psychologue (attestation, bilan, certificat, courrier, rapport, etc.) portent son nom, l’identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles, sa signature et la mention précise du destinataire.
Dans un contexte de procédure judiciaire, et tout particulièrement dans le cadre d’un conflit parental au sujet de la garde d’un enfant, le psychologue doit faire preuve de prudence et de discernement dans la rédaction d’une telle attestation, destinée à être produite en justice. Ainsi, le titre I-6 du code recommande au psychologue de porter sa vigilance sur les utilisations qui pourraient être faites de ses écrits :
Titre I-6 : Respect du but assigné – (…) Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers.
De plus, la CNCDP a suggéré aux psychologues, dans des situations semblables, de s’inspirer des recommandations de la partie de l’article 9 du Code, relatives aux expertises judiciaires :
Article 9 – Dans les situations d’expertise judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune des parties et sait que sa mission a pour but d’éclairer la justice et non d’apporter des preuves.

L’évaluation de personnes que le psychologue n’a pas rencontrées

Le Code de Déontologie distingue deux cas de figure :

    1. Donner un avis sur une situation ou un dossier
    2. Procéder à l’évaluation d’une personne

L’article 9 énonce que le psychologue peut donner un avis sur des situations qui lui sont rapportées, mais qu’il ne peut pas faire l’évaluation d’une personne qu’il n’a pas rencontrée :
Article 9 – Avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement de ceux qui le consultent ou participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il les informe des modalités, des objectifs et des limites de son intervention. Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations rapportées. Mais son évaluation ne peut porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même. (…)

Ainsi, le psychologue se doit de préciser, dans ses écrits, si ce qu’il relate provient de l’examen personnel d’une situation ou s’il s’agit d’éléments qui lui ont été rapportés.

La relativité des évaluations

Toute évaluation, comme l’indique l’article 19, présente un caractère relatif du fait même qu’il s’agit pour le psychologue de ne pas se limiter à recueillir des faits ou des opinions, mais de faire une estimation et d’interpréter des données :
Article 19 – Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations ou interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions peuvent avoir une influence sur leur existence.

 

La possibilité, pour les personnes concernées, de solliciter une contre évaluation procède de ce constat. C’est l’article 9, dont certaines parties ont été déjà citées, qui nous confirme cette possibilité :
Article 9 – Dans toutes les situations d’évaluation, quelque soit le demandeur, le psychologue rappelle aux personnes concernées leur droit à demander une contre-évaluation.

Avis rendu le 17 mai 2010
Pour la CNCDP
Le Président
Patrick COHEN

 

Articles du code cités dans l'avis : Titre I-6, articles 9, 10, 14, 19

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Avis 10-04.doc

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