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Dans un premier courrier, une infirmière, étudiante en psychologie (niveau maîtrise), dit qu’elle a entamé une psychothérapie avec une psychologue en décembre 1992. Après huit mois, la thérapeute lui a proposé de continuer sa psychothérapie en groupe, ce qu’elle a accepté.
Après cinq ans de travail de groupe, la requérante a quitté le groupe et s’adresse à la Commission pour "vous signaler des faits que je considère comme non conformes à la déontologie dans la pratique des psychologues". "Je vous communique, dit-elle, ces informations, vous laissant le soin d’évaluer objectivement le niveau de gravité ou non des faits en rapport avec la fonction de psychologue et leur répercussion dans la thérapie des autres clients".
Elle accompagne sa lettre de la copie de courriers reçus de la thérapeute, ces derniers mois.
A la lumière des faits rapportés et des écrits communiqués, la Commission recense trois questions - Y a-t-il, dans la démarche exposée et dans le contrat proposé aux clients-patients le respect de la personne et la garantie du libre-arbitre de chacun ?
- Le secret professionnel est-il sauvegardé et garanti à chacun dans le groupe ?
- Y a-t-il abus de pouvoir sur autrui ?
Un second courrier, ainsi qu’une cassette audio ont été envoyés à la Commission environ trois mois plus tard. A partir de ces deux documents complémentaires, la Commission retient en plus de ce qui précède - que la requérante a été assignée en justice par la psychologue, suite à son premier courrier envoyé à la Commission sur le motif de "diffamation et atteinte à la réputation professionnelle" ;
- que la psychologue a fait intervenir un collègue auprès d’un "formateur didacticien" consulté par la requérante ; ce collègue, signalant que cette dernière avait des comportements non conformes et des propos "non OK" sur la psychologue.
Ce qui amène la Commission à poser une quatrième question - La requérante peut-elle être poursuivie en justice parce qu’elle a eu recours à la CNCDP ?

Posté le 07-01-2011 15:05:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 1999

Demandeur :
Particulier (Patient)

Contexte :
Procédure judiciaire entre psycho et patient/ tiers/ professionnel non psy

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Thérapie de groupe

Questions déontologiques associées :

- Consentement éclairé
- Respect de la loi commune
- Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)
- Respect du but assigné
- Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
- Abus de pouvoir (Abus de position)

Comme le rappelle le Préambule au présent avis, la CNCDP ne peut se prononcer que si la personne incriminée est effectivement psychologue. L’avis de la Commission ne peut donc être pris en considération que sous la réserve expresse que la psychothérapeute, qui se dit psychologue, le soit réellement.
1. Y a-t-il, dans la démarche exposée et dans le contrat proposé aux clients-patients, le respect de la personne et la garantie du libre arbitre de chacun ?
Un psychologue qui aurait de tels agissements (obliger tout client à payer d’avance et à s’engager, pour un an au minimum ; faire pression pour surseoir à l’arrêt demandé d’une thérapie, etc.) contreviendrait gravement à l’article 9 du Code qui préconise que "avant toute intervention, le psychologue s’assure du consentement de ceux qui le consultent ou participent à une évaluation, une recherche ou une expertise. Il les informe des modalités, des objectifs et des limites de son intervention ".
et au Titre I-1. qui précise que "Le psychologue réfère son exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. Il n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées".
2. Le secret professionnel est-il sauvegardé et garanti à chacun dans le groupe ?
Une psychologue qui transmettrait à des tiers, des diagnostics concernant une autre personne serait en opposition avec le respect du secret professionnel tel que défini dans le Titre I-1. : "Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même".
Le Code encourage, par ailleurs, dans le Titre I-6., le psychologue à se méfier de l’utilisation possible de ses dires par des tiers. : "Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers".
Enfin, selon l’article 3 : "La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur la composante psychique des individus, considérés isolément ou collectivement". En révélant à un groupe, fut-il de thérapie, son évaluation sur une des personnes du groupe, la psychologue est en complète contradiction avec le Code.
3. Y a-t-il abus de pouvoir sur autrui ?
La Commission rappelle l’obligation qui est faite aux psychologues de ne pas user de leur position en terme d’abus de pouvoir. Les écrits de la thérapeute qui s’adresse à sa patiente avec des manifestations très affectives, sont, là encore, en contradiction avec le Code, cf. l’article 11 "Le psychologue n’use pas de sa position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d’aliénation d’autrui".
4. La requérante peut-elle être poursuivie en justice parce qu’elle a eu recours à la CNCDP ?
La Commission rappelle qu’elle est une voie de recours consultatif possible. Le Code indique, en effet, dans son Préambule, que "sa finalité est avant tout de protéger le public et les psychologues contre les mésusages de la psychologie et contre l’usage abusif de méthodes et techniques se réclamant de la psychologie". La requérante est donc totalement en accord avec ce texte en ayant sollicité la Commission.

Conclusion

La Commission dénonce de tels agissements comme contraires aux prescriptions du Code dans la mesure où ils constituent des entraves à la liberté individuelle et à l’autodétermination. Elle réaffirme le droit de chacun à avoir recours aux avis de la CNCDP.

Fait à Paris, le 13 novembre 1999. Pour la CNCDP,
Marie-France JACQMIN, Présidente

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Avis 99-14.doc

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