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Un père, par ailleurs psychologue, est engagé dans une procédure concernant la garde de son fils de 3 ans et demi ; cette procédure a nécessité une expertise psychologique ordonnée par le Juge aux Affaires Familiales. Il interroge la CNCDP sur les modalités de l’expertise psychologique de son fils.
"De nombreuses questions restent pour moi sans réponse", écrit ce père - Pourquoi l’examen de l’enfant est effectué au cabinet de l’expert commis pour l’un des parents (le père) et à domicile pour l’autre (la mère) ?
- Peut-on envisager qu’une expertise puisse être effectuée à domicile ?
- Si on considère que cette visite à domicile peut permettre la prise en compte de l’environnement familial de l’un des parents (la mère), la prise en compte de celui de l’autre parent (le père) (marié, femme enceinte) aurait pu permettre d’envisager d’autres interprétations du dessin sur lequel se base l’expertise ?
- Si les enfants de l’un des deux parents (les deux grands enfants de la mère, un garçon et une fille issus d’un premier mariage) sont rencontrés et servent à appuyer son argumentation, pourquoi ne pas avoir envisagé de rencontrer l’enfant de l’autre parent (fille aînée du père qui vit chez sa mère) ?
- Comment se fait-il que des éléments d’anamnèse mis en avant pour l’un des parents non seulement ne sont pas réels mais en outre n’ont pas été par lui abordés ?
- Pourquoi les troubles du langage à l’origine de la demande d’expertise ne sont-ils perçus que dans le cadre de la séparation alors qu’ils existaient bien avant la dite séparation ?
- D’une demande d’expertise de l’enfant n’y a-t-il pas eu dérive vers une expertise des parents aux dépens de la réelle prise en compte de l’enfant et de ses troubles ?
- Ne prend-on pas dans le cadre de cette expertise plus en compte les difficultés de l’un des parents (la mère) à accepter la réalité de la séparation et à être capable de supporter la "perte de l’objet" que les difficultés réelles de l’enfant lui-même ?".

Posté le 07-01-2011 15:26:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2000

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Intervention d’un psychologue
Précisions :
Expertise judiciaire

Questions déontologiques associées :

- Consentement éclairé
- Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
- Responsabilité professionnelle
- Traitement équitable des parties
- Probité
- Secret professionnel (Obligation du secret professionnel)

La CNCDP tient à distinguer les questions posées - celles relevant de la déontologie et pour lesquelles la commission est compétente ;
- celles relatives à l’appréciation des pratiques et des techniques professionnelles et sur lesquelles elle n’a pas à se prononcer.
La psychologue commise par le Juge aux Affaires Familiales précise qu’elle avait pour mission de - procéder à l’examen psychologique de l’enfant ;
- procéder à des entretiens avec les parents ;
- faire toutes observations utiles pour déterminer le mode de garde et de vie allant dans l’intérêt et l’harmonie du développement de l’enfant.
L’examen psychologique de l’enfant a eu lieu dans un premier temps à son domicile, chez sa mère. Il s’est poursuivi lorsque le père a amené l’enfant voir la psychologue à son cabinet. La psychologue s’est bien assurée, même s’il s’agit d’un très jeune enfant de 3 ans et demi "du consentement de celui qui la consulte, participe à une évaluation, une recherche ou une expertise" et "l’a informé des modalités, des objectifs et des limites de son évaluation". comme le préconise l’article 9 du Code de Déontologie.
La psychologue applique ici un des principes généraux du Code de Déontologie, celui de la responsabilité du psychologue (Titre I-1) : "dans le cadre de ses compétences professionnelles, le psychologue décide du choix et de l’application des méthodes et techniques psychologiques qu’il conçoit et met en oeuvre ".
Elle a également respecté l’article 10 qui précise que "lorsque la consultation pour des mineurs ou des majeurs protégés par la loi est demandée par un tiers, le psychologue requiert leur consentement éclairé, ainsi que celui des détenteurs de l’autorité parentale ou de la tutelle ".
Le fait que la psychologue ait commencé l’expertise au domicile de l’enfant peut donc répondre à ses exigences de pratique professionnelle avec un très jeune enfant ; mais, ne s’étant pas rendue également au domicile du père, cela ne lui a pas permis de "traiter de façon équitable chacune des parties" comme l’exige l’article 9 du Code à propos de l’expertise judiciaire.
De même, en ne rencontrant pas la fille aînée du père alors qu’elle s’était entretenue avec les grands enfants de la mère et qu’elle en tire une conclusion dans son compte-rendu d’expertise, la psychologue semble encore déroger aux dispositions de l’article 9 du Code de Déontologie qui rappelle que "dans les situations d’expertise judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune des parties (...) ".
D’autre part, le demandeur remet en cause le contenu du rapport d’expertise quant aux éléments d’anamnèse le concernant, qu’il réfute. La CNCDP rappelle le respect des droits de la personne (Titre I-1) : "le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel, y compris entre collègues. Il respecte le principe fondamental que nul n’est tenu de révéler quoi que ce soit sur lui-même." et le devoir de probité (Titre I-4) : "Le psychologue a un devoir de probité dans toutes ses relations professionnelles" et "son évaluation ne peut porter que sur des personnes ou des situations qu’il a pu examiner lui-même" (article 9).
La Commission ne répondra pas aux trois dernières questions du requérant. Elles relèvent d’un débat professionnel entre psychologues et sortent de la mission de la CNCDP.

Fait à Paris, le 20 mai 2000. Pour la CNCDP
Marie-France JACQMIN, Présidente

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Avis 00-03.doc

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