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Le requérant est le père d’un adolescent de 17 ans qui, à la suite de l’incendie volontaire de la maison paternelle, a fait l’objet d’une mesure d’Investigation d’Orientation Educative (IOE).
Le requérant a divorcé depuis plusieurs années, les deux enfants résidant alors chez leur mère.  A l’âge de 9 ans, sa fille refuse d’aller chez lui au motif qu’il se serait montré nu devant elle, trois ans auparavant. La mère saisit alors le tribunal de Grande instance. Celui-ci décide de maintenir le droit de visite du père en se fondant sur l’expertise d’un psychiatre qui n’avait constaté aucune perturbation ni chez l’enfant ni chez ses parents et pensait que l’utilisation par la fillette d’un tel argument avait pu être inspirée par le contexte conflictuel du divorce.
Quelque temps après, le requérant saisit le tribunal pour faire appliquer le droit de visite pour sa fille –qui n’avait pu s’exercer compte tenu de l’éloignement géographique de la mère- et entériner une décision de son fils de 13 ans qui avait alors exprimé le souhait de vive chez lui, ce qui est accepté.
L’adolescent a toujours eu des difficultés scolaires et relationnelles avec ses pairs, et plusieurs entretiens psychologiques ont été proposés. Lors de l’un d’eux, il a lui aussi déclaré que son père aurait « baissé son pantalon » devant lui, dix ans auparavant. Les rapports du père et du fils se dégradent, ce dernier devenant violent verbalement et physiquement et allant jusqu’à menacer son père de le tuer Celui-ci inquiet pour la santé psychologique de son fils, et pour sa propre sécurité, alerte le juge des enfants et demande de l’aide. Dix jours plus tard, à la suite d’une vive altercation avec son père et ses grands-parents paternels, il met le feu à la maison de son père. A propos de ce conflit, le père dit « mon fils m’accusait, à tort, comme sa sœur l’avait fait (mais quant à elle, jamais directement) quelques années plus tôt, que j’aurais « baissé mon pantalon » devant lui, ce alors qu’il aurait eu 6 ans ».
Le requérant conteste le rapport psychologique présenté par la psychologue dans le cadre de la mesure d’IOE, avant le procès du garçon. Il le trouve « inobjectif, infamant et pas sérieux ». Il reproche à la psychologue sa partialité dans la présentation des faits « qu’elle présente comme réels », l’absence de « toute distance des discours anti-père » et d’ouverture à « quelque analyse divergente que ce soit ». Il lui reproche principalement de parler de « préjudice subi » à propos des accusations de sa fille, alors même que la justice ne les a pas retenues, de transformer en « exhibition des parties génitales de son père » la phrase de son fils « il a baissé son pantalon ». il estime que les explications de la psychologue sur le refoulement des souvenirs de son fils vont « à l’encontre des conclusions de la psychologie moderne ». Il lui reproche enfin de faire à son endroit une analyse psychologique qu’il trouve calomnieuse en évoquant son «  manque s’estime de soi » alors que la psychologue ne lui a rien demandé «  ni de [ses] activités, ni de [ses] ambitions, ni de la considération qu’[il] se portai[t] ».
Le requérant « souhaite donc que ce bilan psychologique puisse être impartialement étudié par la Commission de Déontologie des psychologues pour qu’elle rende un avis ».

Pièces jointes

  • attestation de la grand-mère paternelle
  • ordonnance du tribunal de Grande Instance et conclusions de l’expertise psychiatrique ordonnance du TGI fixant le droit de visite pour les deux enfants
  • lettre du requérant au juge des enfants
  • rapport psychologique de la psychologue, ‘’ressaisi ‘’ par le requérant avec mise en italique et indexation de nombreux passages
  • résultat de tests concernant les capacités intellectuelles du requérant (non daté)
  • document intitulé « compte analyse psychologique » rédigé par le requérant
Posté le 30-11-2010 15:43:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2004

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Rapport d’enquête

Questions déontologiques associées :

- Respect du but assigné
- Reconnaissance de la dimension psychique des personnes
- Traitement équitable des parties

La Commission tient à souligner que ce qui lui est proposé n’est pas la copie de l’original. Le rôle de la Commission est d’apprécier si, au vu de l’écrit fourni par le requérant, la psychologue a respecté le code de déontologie de sa profession. La Commission n’a pas pour mission de se prononcer sur la véracité des faits rapportés par le requérant.
La Commission traitera les points suivants
- Le respect du but assigné
- le traitement équitable des parties

1) le respect du but assigné

Le « rapport psychologique » élaboré par la psychologue est un document de 89 pages où la psychologue précise d’emblée sa mission à savoir « apporter des éléments concernant la personnalité du mineur ».
Dans le cadre d’un long entretien avec le jeune et avec chacun de ses parents, la psychologue, en s’appuyant sur le récit de leur histoire personnelle et des difficultés qu’ils ont pu vivre, propose un certain nombre d’hypothèses susceptibles d’appréhender l’état psychologique du jeune au moment de son passage à l’acte. En se situant toujours sur le plan du vécu de l’adolescent, elle évoque son environnement social, scolaire relationnel et « les actes d’exhibition sexuelle » qui <<selon lui » auraient été commis par son père.
En relation duelle avec le garçon, on peut comprendre que la psychologue ait choisi de ne pas mettre en doute ce que disait ce jeune sur le préjudice qu’il aurait subi 10 ans auparavant. D’ailleurs lorsque la psychologue fait allusion à l’expertise psychiatrique qui avait innocenté le père accusé de s’être montré nu devant sa fille, elle la restitue dans  ses effets sur le vécu actuel de l’adolescent.
Dans les entretiens avec chacun des parents, la Commission relève chez la psychologue un souci de prendre en compte les émotions ou les événements qui lui sont rapportés. Les hypothèses apportées par le père ou la mère pour tenter d’expliquer le comportement de leur fils sont évoquées. Il en est de même des éléments de leur histoire personnelle. La psychologue rappelle aussi toutes les tentatives du requérant pour mettre en œuvre des mesures thérapeutiques pour son  fils.
Dans l’ensemble du rapport, la psychologue a respecté à la fois l’article 3 du Code << La mission fondamentale du psychologue est de faire reconnaître et respecter la personne dans sa dimension psychique. Son activité porte sur la composante psychique des individus, considérés isolément ou collectivement>>,  le principe du titre I-6 << Les dispositifs méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses interventions et à eux seulement. Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers>>.

2- le traitement équitable des parties

Le requérant estime que la psychologue montre un parti pris négatif envers lui et sa famille, alors qu’il ne trouve pas la même attitude vis à vis de son ex- épouse.
Dans le rapport psychologique qui lui a été transmis, la Commission ne relève pas ce parti pris. En effet, le père est présenté comme un homme ayant de bonnes possibilités de verbalisation et d’ élaboration, soulignant certains traits communs entre son fils et lui, reconnaissant les périodes difficiles qu’il a traversées, s’inquiétant à juste titre des difficultés psychologiques du garçon depuis sa petite enfance. Par ailleurs, l’anxiété de la mère et le climat de tension dans lequel elle aurait fait vivre son fils sont évoqués.
Ainsi l’article 9 du Code a été respecté <<Dans les situations d’expertise judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune des parties et sait que sa mission a pour but d’éclairer la justice sur  la question qui lui est posée et non d’apporter des preuves>>.

 

 

Paris, le 25 juin 2005
Pour la CNCDP
Jean CAMUS
Président

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Avis 04-34.doc

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